2e lecture : Actes 10, 34-38

Discours de Pierre chez Corneille

34 Alors Pierre prit la parole et dit : « En vérité, je le comprends, Dieu est impartial :
35 il accueille, quelle que soit la nation, celui qui le craint et dont les œuvres sont justes.
36 Telle est la parole qu’il a envoyée aux fils d’Israël, en leur annonçant la bonne nouvelle de la paix par Jésus Christ, lui qui est le Seigneur de tous.
37 vous savez ce qui s’est passé à travers tout le pays des Juifs, depuis les commencements en Galilée, après le baptême proclamé par Jean :
38 Jésus de Nazareth, Dieu lui a donné l’onction d’Esprit Saint et de puissance. Là où il passait, il faisait le bien et guérissait tous ceux qui étaient sous le pouvoir du diable, car Dieu était avec lui.
39 Et nous, nous sommes témoins de tout ce qu’il a fait dans le pays des Juifs et à Jérusalem. Celui qu’ils ont supprimé en le suspendant au bois du supplice,
40 Dieu l’a ressuscité le troisième jour.

A propos de cette lecture :

Situons pour commencer ce passage dans les Actes : Pierre après deux discours au peuple de Jérusalem, ch. 2 et 3, et deux autres devant le Sanhédrin, ch. 4 et 5, prononce un discours étendu pour marquer l’étape décisive de l’entrée de païens dans la Vie par le baptême.  Ce discours de Pierre s’inscrit dans la ligne des Actes et la proclamation de la résurrection du Seigneur Jésus. La catéchèse est centrée essentiellement sur la résurrection. Ne peut-on pas regretter que le lectionnaire interrompe le sermon de Pierre au moment où il proclamera, v. 41-43, l’essentiel du message pascal : la résurrection de Jésus ?

« Les grands axes du discours de Pierre : foi dans la résurrection du Christ et dans la nôtre, conversion et témoignage, spécifient parfaitement les caractéristiques du baptême chrétien et la préparation catéchumènale. Le baptême est sacrement de foi, non pas qu’il procure celle-ci automatiquement, mais parce qu’il habilite chaque disciple, en triomphant du mal, à faire de sa vie, une vie de ressuscité qui le prépare à un autre baptême : celui de la mort par lequel s’ouvre l’accès à la vie éternelle avec Jésus-Christ ».

Le récit, 10, 1- : à Césarée, Corneille un centurion romain, un païen donc, est « craignant Dieu » c.a.d. qu’« il est pratiquement converti au judaïsme sans aller jusqu’à la circoncision » Thabut. Il a une vision dans laquelle il lui est demandé de faire chercher Pierre à Joppé, et de lui demander de venir. Pendant que les envoyés sont en route, Pierre a lui aussi une vision qui l’invite à tuer et manger des « viandes impures » Pendant que Pierre s’interroge quant au message de cette vision, arrivent les messagers. Pierre les ayant suivis, arrive chez Corneille et lui dit : v. 29, « j’aimerais savoir pourquoi vous m’avez fait venir ». Corneille après avoir raconté sa vision à Pierre et la raison de l’envoi des messagers pour le faire venir conclut : « Maintenant, nous voici tous devant toi pour écouter tout ce que le Seigneur t’a chargé de nous dire. » v.33

Pierre prend alors la parole et annonce pour la première fois la Bonne Nouvelle à des païens, à la famille de Corneille. Tout son discours est basé sur Jésus-Christ dont il reprend l’itinéraire de l’annonce de l’Évangile, depuis le point de départ. L’Évangile est bien celui qui a été au point de départ de Jésus-Christ, Dieu, l’annonce de la Bonne Nouvelle.

34 : « Dieu est impartial », pour lui pas de considération des personnes.
Cette grâce de la Bonne Nouvelle, Dieu l’offre tant aux juifs qu’aux païens. Il faut comprendre ce que cette ouverture voulait dire et la révolution qu’elle provoquait. En reconnaissant toutefois que déjà certaines personnes s’étaient rapprochées de la religion juive, s’étaient converties et avaient accepté la circoncision. Sans doute, Corneille fait-il partie de ceux-ci donc il n’est pas étranger. Pierre constate qu’effectivement « Dieu ne fait pas de différence entre les hommes » tous sont appelés à la foi. Une justice impartiale « se doit de protéger d’une manière toute particulière les faibles dont le bon droit est toujours menacé »2

35 : « qui le craint et dont les œuvres sont justes » ou qui est agréable à Dieu, pour l’être il suffit de pratiquer la justice et craindre Dieu c.a.d. accomplir pleinement la volonté de Dieu, comme Christ. Corneille faisait partie de ces croyants justes, pratiquants la religion du cœur et pas du culte pour lui-même : « Corneille homme religieux…il adorait le vrai Dieu, il donnait de larges aumônes…priait sans cesse ». Corneille faisait partie de ceux qui par ce qu’ils font et sont, sont agréables à Dieu. On est déjà dans le nouveau testament qui vit une nouvelle relation à Dieu.

Comment Dieu réalise-t-il cette intégration ? Dieu accueille deux types d’hommes : ceux qui l’adorent et ceux qui font ce qui est juste ou « ce qui est agréable à Dieu ». Le P. Dupont explique comment les prophètes tout au long de l’histoire du peuple hébreu ont fait passer le peuple à une nouvelle compréhension de la justice. Ils lui ont fait comprendre que c’est en obéissant à la Loi et donc à Dieu qu’on se rendait agréable au Seigneur plus que par des sacrifices offerts en pur légalisme, avec un cœur absent et loin de Dieu.

Ainsi, en entrant dans ce monde et baptisé au Jourdain, Jésus vient faire la volonté du Père : He. 10, 5-7 « Aussi, en entrant dans le monde, le Christ dit : « De sacrifice et d’offrande, tu n’as pas voulu, mais tu m’as façonné un corps.  6 Holocaustes et sacrifices pour le péché ne t’ont pas plu.  7 Alors j’ai dit : Me voici, car c’est bien de moi qu’il est écrit dans le rouleau du livre : Je suis venu, ô Dieu, pour faire ta volonté. »

36 : « il a envoyé … » C’est ce qu’il explique au verset 37. Tout a commencé avec la parole de salut annoncée par Christ c.a.d. l’accomplissement des promesses faites aux pères.
C’est une Bonne Nouvelle de paix mais plus encore Jésus sera lui-même sera la PAIX qu’il établira par son sacrifice de la croix qui réconcilie tous les hommes et les rassemble en un seul corps. Il « est le Seigneur de tous ».

37 : « vous savez… », Luc fait référence à ce qu’il a déjà dit de Jésus dans son Évangile : « il enseigne dans la Judée tout entière, et en commençant par la Galilée jusqu’ici… » Les événements de la vie de Jésus sont assez connus en ce temps-là de tous ceux qui ont été témoins et bénéficiaires de sa bonté. » L’indication du verset 37 fournit ainsi un premier élément d’interprétation pour l’intelligence du v 38 : dans la pense de Luc, le tournant entre le temps de la Loi et les Prophètes et celui de l’annonce du Royaume de Dieu (Lc 16,16) se situe exactement au moment du baptême de Jésus et de l’inauguration de son ministère » 3

38 : Tout a commencé au baptême donné par Jean. « Comment Dieu a oint d’Esprit Saint et de puissance Jésus de Nazareth. Jésus « a été consacré par l’Esprit » et c’est Dieu qui l’a consacré et rempli de sa force. C’est déjà les prémices de Pentecôte.
L’onction a été la désignation formelle du Messie. Pierre fait allusion au baptême de Jésus par Jean-Baptiste au cours duquel l’Esprit est descendu sur Jésus. C’est déjà les prémices de la Pentecôte.
Luc ajoute : « Esprit Saint et puissance » comme pour expliquer toutes les œuvres et signes que Jésus avait opéré dans la suite. La puissance prophétique qui se déployait en Jésus n’avait rien de magique ni d’étonnant puisque « Dieu était avec lui » : ses œuvres étaient celles de Dieu qui se manifestait par lui aux hommes : « Luc 24, 19 : « Ce qui concerne Jésus de Nazareth, qui fut un prophète puissant en action et en parole devant Dieu et devant tout le peuple ». L’Esprit est à l’œuvre c’est clair.

La venue visible de l’Esprit constitue en quelque sorte l’investiture prophétique de celui qui, dès le premier instant de son existence était déjà le Fils de Dieu par l’action du même Esprit.

On connaît la suite : alors que Pierre était venu en reconnaissance voilà que pendant sa catéchèse l’événement de Pentecôte se produit, et l’Esprit, comme toujours l’ayant devancé, tombe sur tous ceux qui écoutaient la Parole. L’Esprit continue son œuvre et Pierre conclut qu’il ne peut pas ne pas baptiser ceux qui ont ainsi reçu l’Esprit d’une manière aussi spectaculaire.