1ère lecture : Actes 15,1-2. 22-29

1 Des gens, venus de Judée à Antioche, enseignaient les frères en disant :
« Si vous n’acceptez pas la circoncision selon la coutume qui vient de Moïse, vous ne pouvez pas être sauvés. »
2 Cela provoqua un affrontement ainsi qu’une vive discussion engagée par Paul et Barnabé contre ces gens là. Alors on décida que Paul et Barnabé, avec quelques autres frères, monteraient à Jérusalem auprès des Apôtres et des Anciens pour discuter de cette question.
3 L’Église d’Antioche facilita leur voyage. Ils traversèrent la Phénicie et la Samarie en racontant la conversion des nations, ce qui remplissait de joie tous les frères.
4 À leur arrivée à Jérusalem, ils furent accueillis par l’Église, les Apôtres et les Anciens, et ils rapportèrent tout ce que Dieu avait fait avec eux.
Débats lors de l’Assemblée à Jérusalem
5 Alors quelques membres du groupe des pharisiens qui étaient devenus croyants intervinrent pour dire qu’il fallait circoncire les non-Juifs[et leur ordonner d’observer la loi de Moïse.
6 Les Apôtres et les Anciens se réunirent pour examiner cette affaire.
7 Comme cela provoquait une intense discussion, Pierre se leva et leur dit :
« Frères, vous savez bien comment Dieu, dans les premiers temps, a manifesté son choix parmi vous : c’est par ma bouche que les non Juifs ont entendu la parole de l’Évangile et sont venus à la foi.
8 Dieu, qui connaît le cœur humain, leur a rendu témoignage en leur donnant l’Esprit Saint tout comme à nous ;
9 sans faire aucune distinction entre eux et nous, il a purifié leurs cœurs par la foi.
10 Maintenant, pourquoi donc mettez-vous Dieu à l’épreuve en plaçant sur la nuque des disciples un joug que nos pères et nous-mêmes n’avons pas eu la force de porter ?
11 Oui, nous le croyons, c’est par la grâce du Seigneur Jésus que nous sommes sauvés, de la même manière qu’eux.»
12 Toute la multitude garda le silence, puis on écouta Barnabé et Paul exposer tous les signes et les prodiges que Dieu avait accomplis grâce à eux parmi les nations.
13 Quand ils eurent terminé, Jacques prit la parole et dit :
« Frères, écoutez-moi.
14 Simon-Pierre vous a exposé comment, dès le début, Dieu est intervenu pour prendre parmi les nations un peuple qui soit à son nom.
15 Les paroles des prophètes s’accordent avec cela, puisqu’il est écrit :
16 Après cela, je reviendrai pour reconstruire la demeure de David, qui s’est écroulée ; j’en reconstruirai les parties effondrées, je la redresserai ;
17 alors le reste des hommes cherchera le Seigneur, oui, toutes les nations sur lesquelles mon nom a été invoqué,– déclare le Seigneur, qui fait ces choses 
18 connues depuis toujours.
19 Dès lors, moi, j’estime qu’il ne faut pas tracasser ceux qui, venant des nations, se tournent vers Dieu,
20 mais écrivons leur de s’abstenir des souillures des idoles, de l’inconduite sexuelle, de la viande non saignée et du sang.
21 Car, depuis les temps les plus anciens, Moïse a, dans chaque ville, des gens qui proclament sa Loi, puisque, dans les synagogues, on en fait la lecture chaque sabbat. »
Décret de l’Assemblée concernant l’accueil des non-Juifs.
22 Alors les Apôtres et les Anciens décidèrent avec toute l’Église de choisir parmi eux des hommes qu’ils enverraient à Antioche avec Paul et Barnabé. C’étaient des hommes qui avaient de l’autorité parmi les frères : Jude, appelé aussi Barsabbas, et Silas.
23 Voici ce qu’ils écrivirent de leur main :
« Les Apôtres et les Anciens, vos frères, aux frères issus des nations, qui résident à Antioche, en Syrie et en Cilicie, salut !
24 Attendu que certains des nôtres, comme nous l’avons appris, sont allés, sans aucun mandat de notre part, tenir des propos qui ont jeté chez vous le trouble et le désarroi,
25 nous avons pris la décision, à l’unanimité, de choisir des hommes que nous envoyons chez vous, avec nos frères bien-aimés Barnabé et Paul,
26 eux qui ont fait don de leur vie pour le nom de notre Seigneur Jésus Christ.
27 Nous vous envoyons donc Jude et Silas, qui vous confirmeront de vive voix ce qui suit :
28 L’Esprit Saint et nous mêmes avons décidé de ne pas faire peser sur vous d’autres obligations que celles-ci, qui s’imposent :
29 vous abstenir des viandes offertes en sacrifice aux idoles, du sang, des viandes non saignées et de l’inconduite sexuelle. Vous agirez bien, si vous vous gardez de tout cela. Bon courage ! »
30 On laissa donc partir les délégués, et ceux ci descendirent alors à Antioche. Ayant réuni l’assemblée, ils remirent la lettre.
31 À sa lecture, tous se réjouirent du réconfort qu’elle apportait.
32 Jude et Silas, qui étaient aussi prophètes, parlèrent longuement aux frères pour les réconforter et les affermir.
33 Après quelque temps, les frères les laissèrent repartir en paix vers ceux qui les avaient envoyés.
35 Quant à Paul et Barnabé, ils séjournaient à Antioche, où ils enseignaient et, avec beaucoup d’autres, annonçaient la Bonne Nouvelle de la parole du Seigneur.

A propos de cette lecture :

Jusqu’il y a peu -quelques dizaines d’années, on imaginait à peine que la discipline de l’Église ne puisse être commune à toutes les Eglises, sur toutes les latitudes, au risque de voiler la diversité  et ignorer les richesses des différentes cultures .

Le concile Vatican II a marqué un tournant tant dans la conception de la foi que dans l’ouverture à  divers rites de la liturgie, tout en gardant une grande réserve et une extrême prudence vis à vis de certaines liturgies locales. On retrouve encore trop souvent aujourd’hui des positions tranchées qui conduisent certains à désirer une plus grande diversité et d’autres à revenir à l’uniformité.

Ce sont ces mêmes problèmes que l’Église des premiers siècles a déjà connu et qu’elle a  affronté d’une manière courageuse et radicale mais dans le dialogue et la concertation. Elle avait bien conscience de l’enjeu pour l’avenir de l’Église mais elle avait aussi la certitude de ne pas décider par elle même mais que c’était par eux l’Esprit qui leur montrait le chemin de l’Évangile.

Le choix qui était proposé lors du premier concile était de choisir entre une Église fermée sur elle même en annexant des hommes et leur imposant des traditions religieuses  ou une Église  ouverte aux différentes cultures d’où étaient originaires les nouveaux convertis et respectant leur originalité culturelle et leurs valeurs humaines propres.

Il est dommage que le lectionnaire ampute cette lecture de la discussion  qui a accompagné la réflexion des communautés rassemblées pour l’occasion. Il m’a semblé intéressant de l’insérer dans le cadre de ces notes afin de suivre le cheminement de la discussion et mieux comprendre les décisions qui sont prises à la suite de ce concile.

Il nous est bon de voir que déjà dès l’origine du christianisme il y avait des désaccords et comment ils se sont décidés à les affronter dans le dialogue. Ils nous donnent une leçon.

Leurs opinions différentes, voire divergentes, n’empêche pas leur profonde communion dans le Christ. Tous les conflits aboutiront au Concile de Jérusalem  où l’intervention de Paul souligne l’importance du débat face à l’intégrisme des judaïsants  braqués sur des observances rituelles. Pour Paul, au verset 10 : » c’est provoquer Dieu que de faire peser un joug sur les épaules des disciples , que  ni nos pères ni nous-mêmes , nous n’avons eu la force de porter ». « Barnabé  envoyé par l’Église qui est à Jérusalem  jusqu’à Antioche pour vérifier  l’authenticité des options prises par Paul en faveur des gens de culture grecque, soutient son action missionnaire auprès de l’Église de Jérusalem. ..L’argument de Pierre est de souligner que Dieu a donné le Saint Esprit aux gens des nations étrangères tout comme à nous aussi , sans la moindre discrimination v 7-9 » A. Ruelle.

Paul et Barnabé distinguent l’absolu de la foi et la relativité des rites. Pierre  termine en  disant au v 11 : «  Oui, nous le croyons, c’est par la grâce du Seigneur Jésus que nous sommes sauvés, de la même manière qu’eux. » : nous bénéficions de la même gratuité de Dieu qu’eux. 

Les décisions qui sont prises – verset 23-30 sont confiées à des délégués qui auront mission de les annoncer dans les différentes communautés. Le collège des apôtres charge Jude et Silas de faire connaître les décisions qui sont pour toute l’Église. On peut affirmer avec « Aujourd’hui la bible » : »la délicatesse envers les autres passe avant les droits personnels». Désormais la circoncision du cœur remplacera celle de la chair : la conversion du cœur sera bien plus difficile  il faut pour cela se hisser au niveau de l’Evangile pour rester fidèle au Christ , le seul qui puisse nous faire comprendre où se trouve la vérité, ce que nous sommes appelés à  vivre, le lieu où le souffle de l’Esprit ne cesse de renouveler, purifier, d’éclairer.

Lorsqu’on a grandi dans une atmosphère bien précise avec ses us et coutumes, il n’est pas simple de considérer comme des partenaires égaux celles et ceux qui n’ont pas eu la même « éducation ». Cela vaut autant lorsqu’il s’agit de croyants. Les moins jeunes acceptent  difficilement la façon dont les jeunes générations vivent leur foi,  n’hésitant pas à lui donner d’autres formes que leur aînés.  Le Livre des Actes nous rapporte que ce problème caractérisait déjà la primitive Église. Certains croyants  avaient grandi dans des coutumes et les règlements édictés par la loi juive. Ils acceptaient mal que tout cela n’ait qu’une valeur relative. La circoncision était une des ces coutumes « essentielles ». Par ce rite, on voulait signifier que sans la circoncision, on ne pouvait pas être coupé du monde païen. Sans cette intervention dans la chair, on ne faisait pas  partie du peuple élu et on ne pouvait être sauvé.  Comment être disciple de Jésus sans être circoncis ? A ce propos, lors du premier concile, la réunion apostolique à Jérusalem, fut soulevée cette question suscitant de  discussions graves et même des disputes. L’apôtre Jacques, par son intervention, donnera un souffle nouveau à la spiritualité juive en  rappelant ce que les prophètes  proclamaient sur la manière dont Dieu aime son peuple. Plus que d’un rite vénérable, dit-il, il s’agit d’une attitude de vie qui manifeste la foi dans le Dieu de Jésus Christ et non dans les idoles. Qui oserait nier que des discussions similaires ne préoccupent pas aujourd’hui encore certains hommes d’Eglise ?