Isaïe 25, 6-9
Philippiens 4, 12-14
Matthieu 22, 1-14
Il arrive qu’un repas d’amitié soit proposé par une association pour créer ou maintenir des contacts. Un jour, invité à un tel repas, je suis arrivé tout seul, bien à l’heure, ce qui veut dire dans les premiers. Comme il faut bien se mettre quelque part, je me suis placé le long du mur devant une grande table rectangulaire, ni au bout de la table, ni au milieu, pour attendre les invités.
Ils sont arrivés… en petits groupes déjà constitués. Pour parler comme l’évangile, je n’avais pas « le vêtement de noce » du premier groupe. Gentiment, j’ai été invité à me pousser un peu. Pas de problème ! La séquence s’est reproduite plusieurs fois si bien que je me suis trouvé poussé vers le milieu de la table et finalement tout à l’autre bout, en face d’un monsieur venu lui aussi tout seul. II était sourd. La sagesse populaire a raison : Les voisins avant la maison. Les convives avant le menu ! On est bien avec tout le monde. On est mieux avec quelques uns… surtout à table !
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Certains humoristes disent que, dans la Bible, on est toujours en train de manger à moins qu’on ne soit menacé par la faim. Aujourd’hui, le Livre d’Isaïe nous parle d’un festin et l’évangile de Matthieu d’un repas de noces : des mots qui permettent d’imaginer un repas de qualité avec des invités.
Il n’y a pas des repas de fête tous les jours. Paul, qui a traversé bien des aventures, évoque, dans sa lettre aux Philippiens, la nécessité élémentaire de manger tous les jours. Il lui est arrivé de souffrir de la faim et d’avoir plus que le nécessaire. Il a con-nu les privations et l’abondance. Il s’est adapté.
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Le peuple de la Première Alliance gardait en mémoire le souvenir d’un repas organisé par Dieu sur la montagne au cours de sa longue marche au désert. Moïse était monté avec les anciens d’Israël : « Ils contemplèrent Dieu, puis ils mangèrent et burent » (Ex. 24, 3-11). Par ce repas, Dieu exprimait l’union qu’il veut établir avec son peuple.
Aujourd’hui, Isaïe nous propulse aux derniers temps de l’Histoire humaine. Ce sera une grande fête avec un repas fantastique. Le peuple d’Israël et tous les peuples de la terre seront invités. Chaque personne sera accueillie avec ses soucis, ses misères et ses échecs. Le menu réconfortera les plus faibles et comblera les plus exigeants.
Une précision ! Pour avoir accès au repas préparé par le Seigneur, il faudra avoir gravi sa montagne.
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Après la parabole des deux fils et celle des vignerons homicides que Matthieu nous a présentées ces derniers dimanches, voici la parabole du festin de noces. : « Le royaume des cieux est comparable à un roi qui célébra les noces de son Fils. »
En fait, ce roi et ses serviteurs ne sont pas à la noce. Tout est prêt, mais les invités ne veulent pas venir ou bien ont autre chose à faire. Déçu, le roi pique une colère, fait périr ceux qui ont tué ses serviteurs et il incendie leur ville.
Mais le repas est toujours là ! Le roi envoie ses serviteurs à la ville et à la campagne avec la consigne d’inviter quiconque se trouve sur leur route. La salle des noces est remplie. Ayant retrouvé sa sérénité, le roi salue chacun de ceux qui ont accepté l’invitation. Et voilà qu’il fronce le sourcil ! Un invité n’a pas la tenue de rigueur. Il est chassé ! Voilà un roi à la fois généreux et exigeant.
Quelques remarques
* Dans le texte d’Isaïe, pour accéder au repas, il fallait donc gravir la montagne, autrement dit, se désencombrer des bagages inutiles et avoir le nécessaire. Dans le texte de Matthieu, le vêtement de noce n’est pas un uniforme. Chacun à le sien ajusté à sa taille, à sa mission
* Les premiers invités de l’évangile ont tissé leur vie selon les valeurs qui leur convenaient : mon champ, mon commerce, mes loisirs. Enfermés dans l’imaginaire de leur vie réussie, ils n’étaient pas en mesure d’apprécier l’intérêt de l’invitation.
* Ceux qui acceptent d’y répondre ne sont pas prisonniers des valeurs dominantes de la société. Les serviteurs les ont trouvés aux croisées des chemins, peut-être à la re-cherche d’une direction à prendre. Pour eux, l’invitation est comme la sortie d’un tunnel, une aubaine. Sans peut-être s’en rendre compte, leur recherche d’un avenir leur a permis de découvrir et d’endosser le vêtement de noce qu’il cherchait.
* Il y a toujours une fausse note quelque part. Un invité, n’a pas son vêtement de no-ce ! Il est chassé ! Ce n’est pas un caprice du roi car il veut que le bonheur des invités à sa table soit absolument sans ombre. De fait, tout convive qui se tient mal, qui ra-conte des choses inconvenantes, gâche la fête.
* Le roi veut un bonheur parfait pour ceux qui ont été en capacité de répondre à son invitation. Dieu se veut heureux avec un peuple heureux. Chaque invité a confectionné son costume avec la toile tissée par le Seigneur. Chacun a conscience du cadeau reçu et se réjouit de la qualité du costume des autres.
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De la lettre aux Philippiens, je retiens une expression : « J’ai été formé à tout et pour tout. » Dieu travaille chaque vie humaine pour qu’elle contribue à la naissance d’une humanité heureuse. Dieu s’est donné du mal pour faire de Paul l’apôtre qu’il devait devenir.
Il fournit la toile qui servira à la confection du vêtement de noce qui devra s’ajuster à notre personnalité, à notre vocation. Il n’y a pas de costume sur mesure sans séances d’essayage parfois agaçantes. Acceptons-nous d’être travaillés par Dieu pour devenir capables de faire ce qu’il attend de nous ?
Dans toute Eucharistie. Jésus nous prend en charge. Par son corps et son sang livrés, il nous aide à faire le point dans notre cheminement. Il nous éclaire et nous encourage.
D. Boëton