St Joseph des Champs 3 février 2019
4ème Dimanche du T.O. -C-

Jérémie 1, 4-5 1 Corinthiens 12, 31 à 13, 13 Luc. 4, 21-30

Né dans un village proche de Jérusalem, dans une famille de prêtres, Jérémie envisage une vie bien sage dans le cadre des offices célébrés au temple. Devenu jeune homme, il se découvre appelé par Dieu (626) : « Je fais de toi un prophète. » Et il arriva que son parcours ne fut qu’un enchaînement de difficultés qui le dépassaient.
De tempérament timide, il a été de ceux qui devaient dire « à tout le pays, aux rois, aux princes, aux prêtres » les vérités qu’ils ne voulaient pas entendre.
Il s’est attiré des ennuis et des ennemis mais il ne pouvait pas se taire. Sa seule sécurité était la fidélité du Seigneur qui lui a tracé son avenir : « Ils te combattront mais ils ne pourront rien contre toi car je suis avec toi pour te délivrer. »

Remarque

Dieu ne peut intervenir dans l’histoire humaine que par l’intermédiaire d’hommes et de femmes qu’il choisit librement. Comme personne n’est parfait, il se permet de choisir tantôt des personnes au tempérament affirmé et tantôt des personnes sans relief. Et donc, aucun être humain n’est à l’abri d’un appel de Dieu. Personne ne peut dire qu’étant bon à rien, Dieu va le laisser tranquille.
En fait, tout être humain est appelé par Dieu à faire un travail précis. Il y a des missions qui sont plus lourdes que d’autres. La plus modeste est indispensable pour la bonne marche du peuple de Dieu. Quiconque accepte d’être choisi pour entrer dans son projet éprouvera parfois que la main de Dieu est un peu lourde.
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A Nazareth, Jésus est un laïc qui ne fait pas parler de lui. Il est charpentier destiné à être charpentier toute sa vie, au service des gens de son village.
Un jour de sabbat, appelé à faire la lecture, il s’identifie à « l’envoyé » annoncé par le prophète Isaïe pour remettre le monde en ordre : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture que vous venez d’entendre. » Dans la tête des fidèles, l’orage s’allume. Jésus le devine dans leurs échanges de regards. Bien sûr, il est un homme apprécié par sa clientèle et respectueux du Sabbat. Mais en invitant à comprendre qu’il est lui-même envoyé de Dieu, il dérape. « N’est-il pas le fils de Joseph ? » Sous entendu, il n’est que cela !

Jésus sait ce qui se raconte dans le village : il va faire des miracles à Capharnaüm, une ville cosmopolite défigurée par des marchands venus de n’importe où et qui racontent n’importe quoi, alors qu’à Nazareth, il y a aussi des malades qui ne demandent qu’à être guéris : « Fais donc de même ici dans ton lieu d’origine ! »

A Nazareth, on est loin de Jérusalem. Jésus n’est ni prêtre, ni scribe. Il n’a pas fait d’études particulières. Le voilà devenu suspect. Est-il bien le Jésus qu’on a vu grandir ?
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En réponse, Jésus dit simplement que le Dieu d’Israël est le même depuis toujours. Au fil du temps, il s’est manifesté au monde, non pas en s’identifiant à une foule qui se défait aussi vite qu’elle se fait, mais en se manifestant par la manière de vivre d’un peuple repérable parmi les autres peuples. Sa manière de vivre devait interroger les autres peuples : quel est donc le dieu de ce peuple qui connaît une si belle harmonie ?
Au cours des siècles, elle n’a souvent été qu’une succession de couacs mais Dieu ne renonce pas. A Nazareth, Jésus rappelle à son auditoire que Dieu est amoureux de toute l’humanité et il renvoie ses compatriotes bien-pensants à la Bible.

Quand son peuple s’enferme dans des discussions stériles, Dieu agit ailleurs. La famine sévit partout ? Le prophète Elie donne de quoi vivre à une veuve étrangère. La lèpre se moque des frontières ? Le prophète Élisée guérit un lépreux étranger. L’amour de Dieu pour l’homme traverse les frontières aussi bien que la famine et la lèpre.

Remarques

Jérémie se voyait sagement au service du temple comme son père, et les gens de Nazareth n’imaginaient pas Jésus faisant autre chose que des charpentes. Autrement dit, dans l’opinion publique, tout citoyen doit se conformer à l’image qu’elle se fait de lui. Ainsi, nous réduisons le projet de Dieu aux limites de notre horizon. Alors qu’on attend de lui une parole qui rassure, il nous adresse une parole qui dérange.

Il arrive que la recherche absolue du bien-être empoisonne la nécessité de la sécurité. Cela conduit à rétrécir notre horizon. S’enfermer dans l’entre-soi conduit au conflit pour aboutir à l’insignifiance tandis que l’attention à l’autre ouvre un chemin de paix : « L’amour ne passera jamais. » (1 Cor 13, 8)

D. Boëton