Proverbes 31,10-31    –   1 Thessaloniciens. 5,1-6    –     Matthieu 25, 14-30

 Il était une fois trois jeunes bébés. Quelque temps après leur naissance, ils furent baptisés. A l’église, on prit des photos que l’on montra par la suite à ceux qui n’avaient pas pu participer à la célébration.

Sur l’une des photos, on pouvait voir les parrains et marraines en train d’habiller les bébés avec la robe de baptême, le vêtement blanc. Mais, bien sûr, en regardant les photos, on ne pouvait pas entendre ce que le prêtre avait dit, à ce moment-là. Après avoir interpellé chacun par  son prénom, il avait ajouté :

“Tu es une création nouvelle dans le Christ : tu as revêtu le Christ ; ce vêtement blanc en est le signe. Que tes parents et amis t’aident, par leur parole et leur exemple, à garder intacte la dignité des fils de Dieu pour la vie éternelle.”

Quelques jours auparavant, le prêtre avait expliqué le pourquoi du vêtement blanc. Le blanc, dans le dernier livre de la Bible, l’Apocalypse, est la couleur du ciel. Le nouveau baptisé, enraciné dans l’humanité, devient citoyen du ciel. S’il fait des choses comme tout le monde, il ne fait pas tout comme tout le monde.

Le vêtement du baptême n’est pas un costume de cérémonie, un déguisement pour faire la fête. C’est une tenue qui annonce un service à assurer. Jésus Christ continue son travail d’humanisation et de salut, au milieu des hommes, par la vie des baptisés.

Si un baptisé ne fait rien, il paralyse une part de l’action de Dieu dans le monde.

*

Les bébés grandirent et devinrent des hommes. Et puis,… ils prirent encore et encore de l’âge et devinrent de vieux messieurs. Un jour, ils moururent et se présentèrent devant Dieu avec, inévitablement, leur vêtement de baptême.

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 * Le premier arriva avec un vêtement qui ne ressemblait guère à celui de la célébration. Il avait fallu agrandir le col, élargir les épaules et ajouter une bande de tissu pour qu’il soit à sa taille. Il suffisait d’un coup d’œil pour se rendre compte que ce vête-ment avait beaucoup servi. Le tissu était usé et il portait encore des traces de sueur. Et Dieu eut un large sourire.

Il dit : « Très bien, serviteur bon et fidèle ! Je vois que tu as frotté ta foi aux réalités du monde. Là où je t’ai envoyé, tu as travaillé pour la paix et la justice. Cela t’a coûté cher, mais tu l’as fait. Tu as donné à ceux que tu as rencontrés le désir de me connaître. Et même, je peux te dire que, dans les siècles à venir, beaucoup s’inspireront de ton exemple. Entre dans la joie de ton maître. »

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 * Le deuxième se présenta à son tour. Son vêtement de baptême ressemblait au vête-ment du premier. Il avait fallu aussi agrandir le col, élargir les épaules et ajouter une bande de tissu pour qu’il reste convenable. Le vêtement portait des traces de combats et Dieu s’apprêtait à sourire mais il fronça un sourcil : “Qu’est-ce que c’est que ça ?”

Le baptisé baissa la tête : « ça, c’est des taches ! Eh oui ! J’ai eu des moments de faiblesse. J’ai fait des choses à cause de toi, mais il y en a aussi que j’ai faites rien que pour moi. »

– “ Hmm ! Hmm ! Et ça ? !” dit Dieu.

– “Là, il y avait des trous. J’ai traversé des moments difficiles que je n’ai pas pu supporter. J’ai cru vraiment que tu m’abandonnais et alors je t’ai laissé tomber. Et puis, je me suis ressaisi… J’ai rafistolé des pièces sur les trous… comme j’ai pu !”

Dieu réfléchit :- “ « Oui, je vois ! Tu me dis les choses comme elles sont et j’aime ça. Tu sais bien que tu ne m’apprends rien ! Rassure-toi ! Rien de ce que tu as fait de bon n’est perdu. Ton vêtement de baptême, je vais le passer à la lessive de ma miséricorde. Tu sais bien ! C’est le sang que mon Fils a versé sur la croix. Une bonne lessive ! Elle remet tout à neuf. Allez ! Entre dans la joie de ton Maître ».

*

 * Et le troisième baptisé arriva devant Dieu, le visage fermé. Il avait un petit paquet bien ficelé sous le bras. Il le défit avec précaution et présenta son vêtement.

« Voilà ! dit-il. Au jour de mon baptême, j’ai reçu ce vêtement que je n’ai jamais re-pris. Comme tu me demandais toujours des choses impossibles, j’ai trouvé plus profitable de m’occuper de mes affaires. Pour que mon vêtement ne s’abîme pas, je l’ai mis sous Cellophane. Il n’a pas pris un brin de poussière. Pas un faux pli, pas une tache ! Il ne manque pas un bouton ! Tel que tu me l’as donné, je te le rends.”

 

Dieu fronça les deux sourcils. Il était tellement en colère qu’il laissa échapper un juron : “Nom de Moi ! » dit Dieu. Serviteur mauvais et paresseux. Je t’avais confié ce vêtement pour que tu ailles travailler au chantier de mon Royaume. Tu as rencontré quantité de gens qui attendaient que tu leur ouvres un chemin d’espérance. Tout ce que tu as fait, tu ne l’as fait rien que pour toi. Tu n’as jamais eu le moindre souci des autres !  Tout dans ta vie n’a été que calcul pour ta propre gloire. Mille regrets !

Tu n’as pas ta place chez moi ! »

*

Les deux premiers baptisés n’avaient pas forcément réussi grand-chose dans la vie mais ils avaient réussi leur vie.

Le troisième avait peut-être réussi dans la vie mais il avait raté sa vie.

*

Quand Dieu nous fait cadeau de sa vie, c’est pour que les autres en profitent.

Pour parler comme Paul aux Thessaloniciens, baptisés, nous ne sommes pas des  rabat-joie mais des fils de la lumière. Cette responsabilité nous dépasse mais il reste que le Seigneur nous a choisis. Il ne nous donne pas ce que nous désirons. Il nous donne ce qu’il nous faut. Et il nous accompagne sans s’étonner de nos trahisons et de nos chutes et il nous relève chaque fois que c’est nécessaire.

Qu’il nous donne de trouver sa joie dans notre fidélité !

D. Boëton