1 Rois 17, 10-16
Hébreux. 9,24-28
Marc 12,38-44
Si, à l’approche de notre mort, nous apprenions que notre vie a été parfaitement stérile, nous en serions choqués. Nous nous sommes donnés tant de mal et nous avons fait tant de choses !!!
Mais si nous apprenions que notre vie a été extraordinairement féconde, nous en serions étonnés : aucune décoration à présenter. Nous n’avons rien fait d’extraordinaire, et nous étions si peu connus !!!
Aux yeux de Dieu, notre vie est féconde dans la mesure où, par tel ou tel chemin, elle lui a été donnée.
Aujourd’hui, en France, nous faisons mémoire de tous ceux qui ont donné leur vie au cours de la guerre 14-18 et de toutes les victimes de toutes les guerres.
La coïncidence des récits de ce 32ème dimanche du Temps Ordinaire avec le 11 Novembre invite à s’attarder sur le sort du soldat inconnu qui repose à l’Arc de Triomphe à Paris. Les historiens savent dire comment il a été choisi mais ils ne savent rien de sa vie. De sa mort, ils savent seulement que son corps n’était pas identifiable. Au combat, il s’est trouvé dépouillé de sa vie, de son histoire et même de son nom et combien d’autres comme lui ? La pauvreté absolue !
Si l’on en croit les images mortuaires de l’époque, les gradés étaient déclarés « Mort au champ d’honneur » ou « Tué à l’ennemi ». Quant aux hommes de troupe, ils étaient déclarés « Mort pour la France ». Gradé ou pas, le soldat inconnu est mort avec ses secrets. Dans les années qui ont suivi la guerre, combien de femmes, ont cherché, sans le trouver, le corps de leur époux, de leur fiancé, de leur enfant.
*
Les lectures d’aujourd’hui nous parlent de deux femmes elles aussi inconnues. On sait seulement qu’elles sont veuves et, en ce temps-là, plongées dans l’anonymat social. Pour employer le langage de notre temps, elles étaient « sans papiers », « sans-droits ». La plupart connaissait la plus grande pauvreté.
*
C’est la famine à Sarepta, en terre païenne. Pour un dernier repas avec son fils, avant de mourir, il ne reste à une veuve qu’une poignée de farine et un peu d’huile. Fatigué, le prophète Elie passe par là et lui demande à manger ! Informé de la situation. Il dit simplement « N’aie pas peur ! » Et elle donne le peu qu’elle a.
Le récit rapporte la suite. Les réserves ne s’épuisèrent pas. Elle survécut à la famine.
*
Dans l’évangile de Marc, Jésus invite les foules à se méfier des scribes. Spécialistes de la Parole de Dieu, ils savent rappeler aux autres les exigences de la Loi, mais eux-mêmes font n’importe quoi. Entre autres, « Ils dévorent les biens des veuves. »
Profiter d’une personne en difficulté pour faire une bonne affaire à ses dépens est de tous les temps. Après quelques réflexions un peu rudes sur les scribes, Jésus va s’asseoir dans le Temple et regarde ce qui se passe.
Tandis que les gens aisés mettaient dans le tronc de grosses sommes, Jésus attire l’attention de ses disciples sur une veuve. Elle a mis deux piécettes (deux fois rien) dans le tronc. Jésus exprime son admiration. Tandis que les autres donnaient de leur superflu, « elle a pris sur son indigence. » Jésus n’intervient pas et on ne sait pas ce qu’elle est devenue.
*
Le don, on connaît ! On donne des conseils, des recettes de cuisine, on partage des souvenirs, des informations, les loisirs. Mais il nous arrive d’être sollicités.
* Il y a les demandes d’argent que le facteur nous apporte chaque jour. Nous répondons à quelques unes. La plupart vont au panier.
* Il y a aussi notre temps. On aime le maîtriser mais on n’y arrive pas toujours.
– Il y a le temps donné à Dieu. La prière, l’Eucharistie du dimanche sont des choix qui nous arrachent à d’autres occupations.
– Il y a notre temps grignoté ou dévoré par les autres. Comment réagissons-nous quand nous sommes dérangés au travail ou à la maison ? Comment regardons-nous celui qui nous dérange ?
– Il y a le temps donné. Il arrive que des papas et des mamans prennent le temps d’écouter leurs enfants et de jouer avec eux, alors qu’il est si simple de les caler devant la télé. Pour l’enfant, le jeu est une affaire sérieuse. Ces parents seront gagnants quand l’enfant sera devenu adolescent.
*
Dieu est amour, il ne sait faire qu’une chose se donner et nous apprendre à en faire autant. Jésus a traduit en comportements humains cette manière d’être de Dieu. Il a donné sa vie qu’on lui prenait. Le don de soi-même est source de vie. A la suite de Jésus, sommes-nous des sources ?
*
Prendre une décision importante avec prudence est élémentaire.
La fécondité de notre vie n’a pas sa source dans le don que nous faisons de notre superflu mais dans le don que nous faisons de nous-mêmes.
A la suite de Jésus, il est prudent de prendre des risques.
D. Boëton