Baruc 5,1-9
Philippiens 1, 4-11
Luc 3, 1-6.

Le Livre de Baruc nous renvoie au 2ème siècle avant Jésus Christ. En ce temps là, ce sont les Grecs qui dominent l’Occident. Pour favoriser l’unité de l’empire, le projet politique est simple : chaque peuple doit abandonner ses dieux et rendre un culte à l’empereur.
Pour un Juif, le choix est risqué. Il est impossible de concilier le culte dû au Dieu Unique avec le culte exigé par l’empereur. Les communautés juives implantées autour du bassin méditerranéen, loin de Jérusalem et donc isolées, se sentent fragilisées.

Pour soutenir ses frères dans la foi, un juif, (dont on ne connaît pas le nom), a l’idée de se mettre sous le patronage du prophète Jérémie. Quelques siècles plus tôt, ce Jérémie avait consolidé le moral de son peuple qui traversait une épreuve particulièrement éprouvante.
Pour rendre à chacun ce qui lui est dû, l’auteur aurait pu signer son travail «Jérémie». Peut-être par humilité, et parce que les situations ne sont jamais exactement les mêmes, il a signé « Baruc ». C’était un secrétaire de Jérémie.

*

Ce livre de Baruc couvre à peine 10 pages. Son plan est simple : puisque, à travers les siècles, le peuple de Dieu alterne toujours fidélité et trahison, il doit, après chaque rechute, recommencer le même parcours en trois étapes pour retrouver l’amitié avec Dieu. Il doit 1° reconnaître ses infidélités et donc les identifier et les nommer. 2° se remettre en face de la mission reçue (témoigner de sa foi au Dieu Unique) et donc changer de vie et 3° rendre grâce à Dieu qui ne lâche pas son unique objectif : partager sa gloire avec un peuple qui pratique la justice.

C’est cette 3ème étape, (l’action de grâce) que nous avons entendue aujourd’hui. « Jérusalem, quitte ta robe de tristesse (…) Dieu va déployer ta splendeur partout sous le ciel.(…) Dieu conduira Israël dans la joie. »
Devant cette gloire, le psaume 125 développe le ressenti des nations : « Quelles merveilles fait pour eux le Seigneur ! »

*

Dans l’évangile de Luc, nous revenons à la première étape (identifier les écarts). En ce temps-là, ce sont les Romains qui occupent la Terre Promise ! Certains Juifs entrent en résistance. D’autres, même parmi les responsables religieux, collaborent avec l’ennemi. Le peuple de Dieu doit donc s’engager sur le chemin de la conversion.

Les premières lignes du texte ont longtemps été pour moi sans intérêt particulier. Avec Ponce Pilate, la Judée, Hérode, Hanne, Caïphe, Jean, fils de Zacharie, et la Galilée, je vois de qui et de quoi il s’agit. Avec l’empereur Tibère, c’est déjà un peu plus compliqué mais avec l’Iturée, la Trachonitide, Lysanias et l’Abilène, je décroche.

Et pourtant, il y a dans ces quelques lignes un message simple qui nous renvoie à notre quotidien. Nous vivons en France dans une structure politique bien connue. Nous avons un Président de la République, des Préfets de Région, des Préfets et des sous-préfets, des maires et, au milieu de tout cela, la Police et la Gendarmerie Nationale. Les noms de tel ou tel responsable apparaissent éventuellement dans les médias.

L’empire romain était quadrillé comme l’est aujourd’hui notre pays. Au temps de Jésus, il y a un empereur à Rome et des Préfets dans chaque région. Le plus quelconque des pays de l’empire est sous contrôle. L’Administration doit pouvoir maîtriser à temps le moindre écart.
*
C’est dans ce paysage sécurisé qu’un individu donne de la voix : « La parole de Dieu fut adressé dans le désert à Jean, le fils de Zacharie. Il parcourut toute la région du Jourdain en proclamant un baptême de conversion pour le pardon des péchés.»
Ce Jean n’est mandaté ni par le Pouvoir politique ni par le Pouvoir religieux. Il est « inconnu des services de police » Apparemment, c’est une initiative issue de nulle part mais elle intéresse. Alors, ce Jean roule pour qui ?
En étudiant son comportement, on remarque qu’il ne demande pas qu’on le suive. Sa parole s’adresse à la conscience de chacun : « Préparez le chemin du Seigneur. » Que chacun identifie ses dérapages et rectifie sa vie !

Dans un premier temps, il n’y a pas de quoi inquiéter le Pouvoir. Qu’y a-t-il de plus fragile qu’une voix !? Pourtant, au fil des siècles, la Parole de Dieu finira par ébranler l’ordre établi par les autorités civiles et religieuses.

Pour conclure. Au fil du temps, quand l’humanité cherche une vie toujours plus facile, le désordre est au bout du parcours. L’harmonie d’une société commence par la conversion de chacun !
Le temps de l’Avent nous est offert pour recommencer à nous situer en vérité devant Dieu. Dans sa prière, Paul demande que les Philippiens sachent « discerner ce qui est important. » Cette prière est d’actualité.

D. Boëton