St Joseph des Champs, le 17 février 2019
2ème Dimanche de Carême -C-
Genèse 15, 5-12, 17-18
Philippiens 3, 17-4, 1
Luc 9, 28-36
Parti de la Chaldée (Irak du sud), Abraham est arrivé à destination entre le Jourdain et la Méditerranée. C’est là qu’il doit vivre et c’est là qu’il aurait été mieux de ne pas venir ! Cette région est une zone où les tribus locales survivent de querelle en querelle. C’est aussi un couloir où les grandes puissances de l’époque (le Moyen Orient et l’Egypte) s’affrontent régulièrement. On dirait que la mission du peuple de Dieu sera d’ouvrir un chemin de paix au cœur des conflits !
Pour compléter le tableau, Abraham est miné par une humiliation intérieure. Avec son épouse, il ne peut avoir d’enfant. Il a bien eu un fils avec une servante, mais ce n’est pas la même chose.
Et voilà qu’un jour, Dieu provoque Abraham : « Regarde le ciel et compte les étoiles si tu le peux (…) Telle sera ta descendance. » Et il en rajoute : « Je suis le Seigneur qui t’ai fait sortir d’Our en Chaldée pour te donner ce pays en héritage. »
Abraham a de quoi s’étonner. Avant d’être le père d’une multitude, il serait bon d’avoir un premier enfant. Or jusqu’à maintenant, cela lui est refusé. Pour devenir propriétaire de quelque chose, il faut suivre une procédure qui rend légale l’acquisition. Avec qui Dieu va-t-il négocier l’acquisition d’un territoire ? Abraham veut bien entrer dans l’alliance mais il faudrait que Dieu clarifie la situation. Il le fait.
Abraham attend un enfant de son épouse et Dieu accepte de faire un contrat à la manière de ce temps-là. Les contractants coupaient en deux des animaux pris dans le gros bétail et disposaient chaque moitié en face de l’autre de manière à faire un chemin. Puis ils l’empruntaient en disant : «Qu’il m’arrive ce qui est arrivé à ces bêtes si je ne suis pas fidèle à ma parole. » Il fallait réfléchir avant de s’engager.
Abraham mit en place le dispositif. Le soir, tandis qu’il était plongé dans une grande torpeur, Dieu, sous le signe d’un brasier et d’une torche enflammée, passa entre les quartiers d’animaux. Dieu était engagé.
On peut remarquer deux choses :
* Dieu et Abraham ne traitent pas à égalité. Abraham n’a pas fait le passage. C’est Dieu qui prend l’initiative de l’alliance. Ici, le peuple de Dieu sera un jour chez lui.
* Des oiseaux rapaces attirés par les cadavres sont venus troubler le contrat. Abraham dut les chasser. La mise en œuvre de l’alliance ne sera pas un long fleuve tranquille.
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A plusieurs reprises, les évangiles présentent Jésus à l’écart pour prier. Dans le récit de Luc, Jésus prend avec lui les trois premiers disciples qu’il a appelés, Pierre, Jacques et Jean et il prie en leur présence. L’effet de sa prière est visible sur sa personne : transfigurée, sa divinité saute aux yeux.
Il n’est pas seul. Moïse qui évoque la Loi et Elie qui évoque les prophètes échangent avec lui. Ils n’ont pas vécu à la même époque mais leurs missions s’harmonisent.
Dans le récit de la Genèse, des oiseaux rapaces ont perturbé le déroulement du contrat. L’avancée de Jésus vers la Gloire ne sera pas une belle procession. Il traversera la passion. Ce parcours de la croix à la gloire sera celui de ceux qui acceptent de le suivre.
Pris dans une bourrasque, les apôtres entendent la voix du Père : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le. » Tenir compte de la parole de Jésus sera le seul chemin à suivre pour être accueilli par le Père.
En conclusion, trois verbes peuvent résumer ces lectures : le verbe voir. Abraham et les apôtres prennent conscience de ce qui se passe. Le verbe écouter. Une parole de Dieu ouvre un chemin pour faire face à une situation qui s’impose. Le verbe : choisir. Ce chemin, va-t-on le prendre ? Notre carême sera un élément de réponse.
On peut se reconnaître dans la réaction des premiers chrétiens. Empêtrés dans une société qui se permet tout et le reste, les chrétiens de la ville de Philippe sont déstabilisés. Paul les encourage :
1). « Beaucoup de gens se conduisent en ennemis de la croix du Christ. Ils vont à leur perte. (Acceptons-nous de voir ?)
2). «Le Seigneur Jésus Christ transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux. (Acceptons-nous d’écouter ?)
3). « Tenez bon dans le Seigneur ! » (Qu’allons-nous choisir ?)
D. Boëton