Isaïe 45,1.4-6     –    1 Thessaloniciens 1,1-5     –     Matthieu 22, 15-21

En Israël, la population du royaume de Samarie a été déportée (701 av. J.C) à Ninive par les Assyriens. Plus de deux siècles plus tard, c’est au tour de la population du royaume de Juda de subir le même sort par les Chaldéens. Ils sont déportés à Babylone.

Avec la disparition du petit reste du peuple élu, on peut légitimement penser que Dieu a disparu de l’Histoire des Hommes. Dans une telle situation, les déportés ont le choix entre trois attitudes : ou bien  douter de la fidélité de Dieu, de sa compétence ou bien reconnaître leur propre infidélité et donc leur responsabilité. Ils peuvent aussi choisir Mardouk, le dieu du vainqueur, mais ce dieu des Babyloniens ne protègera pas son peuple contre l’invasion des Perses (Iran aujourd’hui), conduits par Cyrus. Et la question  de Dieu se pose à nouveau.

 

Cyrus s’empare donc de la Chaldée (-539). Il n’a pas la même politique que les envahisseurs de Ninive et de Babylone. Il ne dévaste pas les pays conquis et il permet aux déportés des diverses nations de retourner dans leur pays (-538).

Comme tous les autres déportés, ceux de Jérusalem se réjouissent mais ils ont du mal à comprendre la manière de Dieu de fonctionner. Normalement, les décisions de Dieu concernant son peuple sont transmises par des prophètes qui sont des hommes de leur sang. Pourquoi Dieu choisit-il un païen pour annoncer le retour au pays ?

 

Un disciple du prophète Isaïe, lui-même déporté, ouvre un chemin de réponse. Dans le texte d’aujourd’hui, son message ne s’adresse pas à Cyrus mais aux déportés pour réveiller leur courage : « Ainsi parle le Seigneur à son messie, à Cyrus : (…) A cause de mon serviteur Jacob, d’Israël mon élu, je t’ai appelé par ton nom… »

Dieu réapparait dans l’Histoire de son peuple. Cyrus, qui ne  connaît pas Dieu, va être l’instrument de sa décision. Il ne négocie rien avec lui. Il ne lâche rien de son pou-voir : « Hors moi, pas de Dieu. » Que tous les puissants de la terre le sachent : « Je suis le Seigneur, il n’en est pas d’autre. »

Toute la louange du disciple d’Isaïe remonte à Dieu qui n’a pas oublié son peuple. Finalement, Cyrus n’est que Cyrus, et Dieu est Dieu tout simplement.

 

En bref, Dieu a utilisé les Assyriens pour punir les Samaritains, les  Chaldéens pour punir les Juifs de la Judée, et les Perses pour ramener les exilés de Chaldée à Jérusalem. En toute circonstance, Dieu reste le maitre du jeu. Le Psaume 95 le dit de manière très simple :

« Il est grand, le Seigneur hautement loué

redoutable au dessus de tous les dieux :

néant, tous les dieux des nations. »

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Quel que soit le dieu reconnu par n’importe quel peuple, les hommes qui sont au pou-voir édictent des lois. Au temps de Jésus, ce sont les Romains qui occupent la Palestine. Ils imposent leurs lois. Maintien de l’ordre oblige ! La Loi juive peut-elle s’accommoder de la Loi romaine. ? Si OUI, y a t-il des limites ? Si NON laquelle choisir ?

Les Hérodiens (qui tirent profit de la collaboration avec l’ennemi) et les Pharisiens (qui considèrent que tout pouvoir vient de Dieu, y compris celui de l’empereur) ont mijoté une bon-ne question pour embarrasser Jésus et le compromettre.

 

La scène se passe dans le Temple, un espace ou la monnaie romaine ne peut être utilisée. Après une entrée en matière flatteuse, ils posent leur question : «  Est-il permis, oui ou non, de payer l’impôt à César ? »

En sortant de la monnaie romaine de leur poche, les Hérodiens et les Pharisiens ont déjà donné un élément de la réponse. Ils utilisent la monnaie romaine. Peu importe ! Si Jésus répond Oui à la question, il se range du côté des collaborateurs et il est mauvais juif. S’il répond Non, il sera dénoncé aux autorités romaines comme résistant.

 

En partant de la réalité quotidienne qu’on lui soumet, Jésus élève le débat. Tout homme est à l’image de Dieu mais tout homme est aussi membre d’une famille humaine, d’une tribu, d’une nation. A quelque niveau que ce soit, tout groupe doit s’organiser pour rendre la vie possible dans la famille, la tribu, la nation. Et donc, il faut un chef qui fasse respecter le comportement convenu.

Les hommes étant ce qu’ils sont, tout pouvoir tend à devenir absolu. Dans l’empire romain, l’État exerce une emprise totale sur toute chose, même en matière religieuse. La personne de César est sacrée et même divine.

 

Jésus supprime cette domination exclusive de l’État sur l’individu ; il distingue « l‘homme » du « citoyen », le « prochain »  du « compatriote ». Le  Royaume de Dieu l’emporte sur n’importe quel autre royaume de la terre.

« Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». Même César aura des comptes à rendre à Dieu. L’homme obéit à César dans la mesure où César reste dans le domaine qui est le sien. Il faut payer l’impôt à César. Le culte n’est rendu qu’à Dieu seul.

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La communauté chrétienne de Thessalonique est née quelques années seulement a-près la résurrection de Jésus. Les nouveaux chrétiens n’ont pas à choisir entre  Jésus et l’empereur mais entre Jésus et les lois de la communauté juive.

Selon Paul, les nouveaux chrétiens ont trouvé la bonne attitude : une foi active, une charité qui se donne de la peine et une espérance qui tient bon. Dans un monde qui  s’affole, voilà des repères qui peuvent aider à choisir l’orientation qui fera naître un monde plus humain même si les bousculades immédiates sont inconfortables.

D. Boëton