Nombres 11, 25-29
Jacques 5, 1-6
Marc 9, 38-43, 47-48

Il arrive à l’homme de prendre des initiatives. Certaines sont heureuses et d’autres le sont moins. Dieu aussi prend des initiatives mais il a besoin des hommes pour les mettre en œuvre. Pas de chance ! Aucun n’est indemne de tout reproche. Et donc, il doit faire avec ce qu’il a sous la main.

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Le livre de l’Exode (2,11) raconte qu’en prenant la défense d’un hébreu maltraité par un Egyptien, Moïse a tué l’agresseur. Pour échapper à la police, il s’enfuit d’Egypte.
C’est cet homme que Dieu va chercher pour libérer les Hébreux de l’esclavage et en faire son peuple. Revenu en Egypte, Moïse obtient leur libération.
Embarqué dans la traversée du désert avec 600.000 fuyards, sa charge est lourde, et vite trop lourde. A la demande de Dieu, c’est lui, Moïse, qui choisit 70 anciens pour leur partager ses responsabilités. Ils reçoivent une part de l’Esprit qui anime Moïse.

Mais voilà qu’un jeune homme a observé que deux élus ne se sont pas présentés à l’assemblée constituante. Ils avertissent Moïse : absents de la rencontre, ils n’ont pas le droit de prophétiser. L’étroitesse d’esprit de ce jeune homme développe la largeur d’esprit de Moïse. « Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple, un peuple de prophètes ! »

Accueillir cette lecture du Livre des Nombres au début de la démarche synodale du diocèse ouvre des fenêtres. Ces temps-ci, les évêques ont beaucoup de soucis. Com-ment les épauler efficacement dans la société d’aujourd’hui ?
En ouvrant le synode, notre évêque invite le peuple dont il a la charge (tous les Mayennais) à s’organiser par petits groupes de réflexion et à prendre la parole pour l’éclairer sur l’état du diocèse et lui permettre de prendre les décisions qui conviennent. « Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tous les Mayennais un peuple de prophètes ! »

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Dans l’évangile de Marc, Jésus a donc pris l’initiative de choisir des hommes qui partageront sa mission. Sont-ils à la hauteur des exigences? Récemment, il les a surpris en train de discuter de broutilles : qui est le plus grand ? Et aujourd’hui ils affichent que leur groupe a des capacités singulières qui lui sont réservées !

Il est arrivé un jour qu’un individu a entrepris d’expulser les démons au nom de Jésus. Dans cette situation Jean, porte-parole du groupe, sait ce qu’il faut faire : « Nous l’en avons empêché car il n’est pas de ceux qui nous suivent. » Voilà un groupe aussi fermé que solidaire. La réponse de Jésus bouscule leur schéma. Le seul critère qui permet d’apprécier avec justesse un comportement est la référence à Jésus.
«Celui qui fait un miracle en mon nom ne peut pas, aussitôt après, mal parler de moi. » Intervenir au nom de Jésus, c’est être assez uni à lui pour faire ce qu’il ferait et dire ce qu’il dirait.
Mais si ma relation à Jésus est bonne, elle n’est pas une référence absolue. Si instinctivement, je veux que les autres pensent et agissent comme moi, je dois en toute urgence élargir mon horizon. A la consigne : il ne nous suit pas, donc il est exclu. Jésus répond par une autre consigne : « Qui ne s’oppose pas à nous est pour nous. » Cela concerne notre quotidien le plus banal : « Celui qui vous donnera un verre d’eau au nom de votre appartenance au Christ ne restera pas sans récompense. » Chacun a une réponse personnelle à donner aux appels de Jésus.

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S’il se fait beaucoup de bien de mille et une manières au nom de Jésus Christ, l’évangile nous rappelle que le mal est présent partout. Si chacun a le devoir d’apporter sa part à la construction de l’Eglise, il peut aussi, s’il n’y prend garde, avoir une attitude scandaleuse.
Scandaliser, c’est être pour quelqu’un une occasion de chute. Le disciple, et spécia-lement le plus faible doit absolument être préservé de l’obstacle qui fait tomber. Mieux vaut risquer en cette vie un renoncement important plutôt que de chuter soi-même ou d’être occasion de chute pour la foi des plus fragiles. Chacun doit construire sa vie en se sachant responsable des autres.

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Lire maintenant la lettre de Jacques attire notre attention sur l’usage que nous faisons de nos biens : « Vous autres, les riches ! Pleurez, lamentez-vous sur les malheurs qui vous attendent. » Nous vivons dans un monde où l’extrême richesse et l’extrême pauvreté sont également indécentes. Nous sommes scandalisés par les riches et en même temps nous voulons être plus riches !
De l’extrême richesse et de l’extrême misère, préserve-nous, Seigneur ?
A chacun de mesurer le chemin qu’il doit parcourir pour être un membre actif dans le peuple de prophètes que souhaitait Moïse !
D. Boëton