Épiphanie

Isaïe 60, 1-6        Ephésiens 3,2-3a.5-6     Matthieu 2, 1-12

 

Tous les hommes disséminés aujourd’hui à travers le monde partagent la même hu-manité. Ils ont tous des points communs : une tête, un tronc, des membres.. Ils ont tous une parole articulée (avec des consonnes !) qui leur permet de communiquer entre eux et de se faire comprendre.

Avec ces points communs, ils restent très divers. Chaque homme fait partie d’une fa-mille qui fait partie d’un clan, d’une tribu, d’un peuple. Chaque peuple a sa langue, son histoire, sa culture et donc quand Dieu veut s’adresser à un homme, quel qu’il soit, où qu’il soit,  il doit utiliser un langage qui lui soit compréhensible.

Comment Dieu est-il intervenu dans le monde ?

 

D’abord  faire un état des lieux : la place de la nuit

Le texte d’Isaïe évoque un peuple de Dieu en très mauvais état. Dans son Histoire les malheurs se sont enchainés avec une rare violence : l’esclavage en Égypte, la traversée du désert,  et puis l’exil suivi d’un retour qui n’ouvre aucun avenir. La Terre Promise n’est plus qu’une province insignifiante absorbée par des empires qui se suc-cèdent. Revenus sur leur terre, les Juifs avaient rêvé, qu’avec un roi dominant le mon-de, ils retrouveraient la notoriété et la gloire d’autrefois ! Une gloire promise par Dieu ! C’est raté ! Plongé dans la nuit, le Peuple de Dieu fait une déprime !

 

 * Le jour de Noël, aux alentours de Bethléem, nous avons rencontré des veilleurs de  nuit, des bergers. Une nuit n’a pas été comme les autres !

 

 + Le récit de Matthieu nous fait partager l’ordinaire de quelques mages en Orient. La nuit est comme leur lieu de travail. Mi-magiciens et mi-savants, ils scrutent les étoiles. Une nuit, ils ont eu des surprises !

 

 = Dans sa lettre aux Éphésiens, Paul nous parle de mystère. J’ai retenu  deux définition du mystère : Celle d’un titi parisien : « Un mystère, c’est quelque chose qu’il faut gober mais qu’on ne peut pas piger. » Et celle d’un professeur de théologie : « Un mystère est une action de Dieu qui sauve. » Il sauve à sa manière.

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Dans ces situations, comment Dieu se fait-il comprendre ?

– Dieu n’accepte pas de vivre avec un peuple qui rumine ses échecs. Il lui envoie un signal. Un lointain successeur d’Isaïe s’exprime à contre-courant de l’opinion généra-le. Ce n’est pas en ruminant le passé qu’on peut percevoir le salut que Dieu apporte. Il n’a pas épuisé ses ressources : « Debout !  Resplendis ! Lève les yeux ! Elle est venue ta lumière. Les ténèbres recouvrent la terre (…) Mais sur toi se lève le Seigneur, sur toi sa gloire apparait. » Il y a toujours un lendemain qu’on peut faire chanter.

 

* Perçus comme des marginaux, les bergers de Noël sont quand même imprégnés par la culture de leur peuple. Les anges sont des intervenants familiers dans leur culture.

Une rumeur qui ne peut avoir sa source que dans le ciel concerne un nouveau-né couché dans une mangeoire. Sûrement, une famille est en difficulté ! Ils se lèvent. Dans les alentours, les bergers connaissent tous les abris possibles. Ils savent où chercher et ils trouvent. Les parents vivent leur situation de détresse  avec une telle sérénité que

cet enfant a un avenir. Rejeté par tous, il rassemblera tous les peuples.

 

  + Pour intégrer les non- juifs dans son projet de salut, Dieu s’introduit dans leur culture. En observant le ciel en Orient, des spécialistes sont intrigués. Une nuit, ils se trouvent devant un problème inattendu. Quelques uns sont assez intrigués pour suivre une étoile sans savoir où elle va les mener.  Elle est le signe d’un événement important. Après avoir levé les yeux, ils se lèvent et prennent la route.

Dans leur culture ou leur imagination, une étoile nouvelle annonce un roi nouveau. L’étoile se conforme à leur logique. Un roi ne se trouve que dans une capitale. Les voilà à Jérusalem. Mais Dieu les emmène plus loin. Ils trouveront l’Enfant.

 

= Le projet de salut de Dieu concerne toutes les nations. Pour réaliser son projet, Dieu choisit l’homme le moins capable d’accepter une telle mission. La nuit de Paul, c’est son horizon borné. Juif intégral, les chrétiens étaient à ses yeux un danger pour l’avenir du peuple de Dieu. Renversé dans ses convictions sur le chemin de Damas, il découvre que le projet de Dieu était autre chose que ce qu’il avait pu en saisir. Désormais, un mystère, une lumière venue d’ailleurs l’habite. « Toutes les nations sont associées au même héritage. »

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Comment recevoir ces récits ?

Cette  fête de l’épiphanie  invite chacun à reconnaître sa nuit, à identifier ses motifs de désespérance et à se lever pour chercher le filet de lumière qui existe quelque part dans sa vie, ou repérer dans ses relations une parole, une attitude qui est comme une lumière et à se lever pour la suivre.

Cette fête concerne aussi  le nouveau peuple de Dieu, notre Église qui n’intéresse plus grand monde dans notre Occident.

Dans cette Église universelle, l’épiphanie concerne notre Église locale, le diocèse de Laval,  qui s’aventure dans un synode. Quelle est la nuit dans laquelle notre diocèse se débat ou se complait ? Dieu va s’adresser à notre Église en utilisant un langage et des signes que nous pouvons comprendre. Où sont les grottes qu’il faut repérer. Quelle est l’étoile imprévue qu’il faut suivre ?

 

Il délivrera le pauvre qui appelle et le malheureux sans recours

Il aura souci du faible et du pauvre, du pauvre dont il sauve la vie.  (Ps 71)

D. Boêton