Isaïe 60
1 Debout, Jérusalem resplendis ! Elle est venue, ta lumière, et la gloire du Seigneur s’est levée sur toi.
2 Voici que les ténèbres couvrent la terre, et la nuée obscure couvre les peuples. Mais sur toi se lève le Seigneur, sur toi sa gloire apparaît.
3 Les nations marcheront vers ta lumière, et les rois, vers la clarté de ton aurore.
4 Lève les yeux alentour, et regarde : tous, ils se rassemblent, ils viennent vers toi ; tes fils reviennent de loin, et tes filles sont portées sur la hanche.
5 Alors tu verras, tu seras radieuse, ton cœur frémira et se dilatera. Les trésors d’au-delà des mers afflueront vers toi, vers toi viendront les richesses des nations.
6 En grand nombre, des chameaux t’envahiront, de jeunes chameaux de Madiane et d’Épha. Tous les gens de Saba viendront, apportant l’or et l’encens ; ils annonceront les exploits du Seigneur
A propos de cette 1ère lecture :
Ce chant appartient aux chapitres 56-66 d’Isaïe, appelés « le Troisième Isaïe. » Ces chapitres constituent la vision finale du livre d’Isaïe. Ils datent du lendemain du retour de l’Exil à Babylone ; ils annoncent que Jérusalem sera restaurée dans toute sa splendeur, tant dans sa fonction de rassemblement et d’unité du peuple, que de lieu de la présence de la gloire de Dieu.
Il annonce qu’il y aura une vraie paix et qu’elle sera obtenue grâce au « juste ». « Le troisième Isaïe invite à choisir son chemin « si on veut participer à la maison du Seigneur car il ne suffit plus de se réclamer de quelque glorieux ancêtre » D. Janthial
Le chapitre 59 exprime toutes les déceptions de ceux qui étaient revenus au pays, décrivant ce qu’ils avaient trouvé à leur retour. La perversité des gens était telle que « personne n’accuse à juste titre » v. 4, qu’ « ils font éclore des œufs de vipère » v. 5, que « leurs pieds courent au mal » v. 7, qu’ « ils ne connaissent pas le chemin de la paix » v. 8. De plus, Jérusalem sortait à peine de ses ruines et seul l’autel du temple avait été rebâti. C’est le désespoir et l’auteur, au dernier verset, les invite à relever le défi de l’espérance et à entrer progressivement dans le mouvement de la joie et de la lumière parce que Dieu ne reste pas indifférent, il n’oublie pas son Alliance mais qui plus il la renouvelle : 13
60.1 Isaïe lance une invitation discrètement joyeuse, un cri qui manifeste l’engagement de Dieu : « Debout que brille ta lumière… »
On pourrait se poser la question : que dirait le prophète Isaïe à nos contemporains, aux croyants d’aujourd’hui ? « Le message d’Isaïe aujourd’hui, c’est : vous avez l’impression d’être dans le tunnel, mais au bout il y a la lumière. Rappelez-vous la promesse : le Jour vient où tout le monde reconnaîtra en Jérusalem la Ville sainte. Conclusion, ne vous laissez pas abattre, mettez-vous au travail, consacrez toutes vos forces à reconstruire le Temple comme vous l’avez promis. » (Thabut dans l’intelligence des Écritures » I p.103)
2e lecture : Éphésiens 3, 2-3a.5-6
2 si du moins vous avez appris la grâce que Dieu, pour réaliser son plan, m’a accordée à votre intention,
3a comment, par révélation, j’ai eu connaissance du mystère.
5 Ce mystère, Dieu ne l’a pas fait connaître aux hommes des générations passées comme il vient de le révéler maintenant par l’Esprit à ses saints apôtres et prophètes :
6 les païens sont admis au même héritage, membres du même corps, associés à la même promesse, en Jésus Christ, par le moyen de l’Évangile.
A propos de cette 2e lecture :
Texte proposé par l’Église en raison, du verset 6 qui annonce l’entrée des païens dans le Corps de l’Église par le moyen de l’Évangile.
Paul est en prison lorsqu’il écrit la lettre aux chrétiens d’Éphèse. Le ton ici est très personnel. Il se considère avant tout prisonnier du Christ, chargé de mettre en lumière toute l’étendue du plan du salut qui regroupe en un seul corps Juif et païens convertis.
De ce texte on retiendra avant tout que l’Épiphanie -la manifestation du Seigneur- n’est pas un fait du passé dont on fait mémoire mais une réalité à vivre aujourd’hui : « les païens sont admis au même héritage, associés à la même promesse, à la même communion avec Dieu. »
Le mystère du Christ, dont nous parle Paul, concerne tous les hommes promis au partage de l’universel amour gratuit de Dieu. Non seulement, tous les hommes sont l’objet de l’amour de Dieu, bénéficiaires de cet amour gratuit mais ils sont également appelés à en faire bénéficier les autres !
Ce mystère fait craquer toutes les barrières. Le mystère de la lettre aux Éphésiens c’est le contenu de l’Évangile : le projet d’amour de Dieu.
Paul se trouve devant un si grand mystère qui lui a été révélé et que désormais les païens sont associés aux juifs. Il se sent si petit qu’il ne pense qu’à une chose que ce mystère soit annoncé à tous juifs et païens. Remis dans le contexte du temps de Paul, affirmer que Dieu allait rassembler juifs et païens, par le Christ, c’était un scandale ou alors comme le dit Paul « une révélation… un mystère ».
Le mystère du Christ, dont nous parle Paul, concerne tous les hommes promis au partage de l’universel amour gratuit de Dieu. Non seulement, tous les hommes sont l’objet de l’amour de Dieu, bénéficiaires de cet amour gratuit mais ils sont également appelés à en faire bénéficier les autres !
C’est grâce à la prédication de l’Évangile, de la Parole que va se réaliser le dessein de Dieu selon lequel tous les hommes doivent avoir part à la même promesse.
Tous les hommes : cela suppose que toutes les barrières ont craqué, qu’aucune n’existe plus puisque tous les hommes sont associés à la même communion avec Dieu, dans le Christ.
C’est le mystère de Dieu, tenu caché depuis toujours et qui vient d’être révélé.
Au seuil de cette année nouvelle, nous voici invités à prendre conscience que nous sommes l’objet de la gratuité de l’amour, aimés de Dieu, pour être ouverts et disponibles vis-à-vis des autres qui n’ont peut-être pas conscience qu’ils sont eux aussi aimés gratuitement.
Nous voilà appelés à devenir serviteurs et artisans de la gratuité de l’amour divin.
L’Épiphanie c’est la réalisation actuelle du dessein de Dieu que le Concile Vatican 2 exprimait dans Ad Gentes : « La mission de l’Église s’accomplit donc par l’opération au moyen de laquelle obéissant à l’ordre du Christ et mue par la grâce de l’Esprit et la charité, elle devient en acte plénier présente à tous les hommes et tous les peuples…de telle sorte qu’elle leur soit ouverte comme la voie libre et sûre pour participer pleinement au mystère du Christ…
« Cette mission continue et développe au cours de l’histoire la mission du Christ lui-même qui fut envoyé annoncer aux pauvres la bonne nouvelle ; c’est donc par la même « route qu’a suivie le Christ lui-même que sous la poussée de l’Esprit du Christ, l’Église « doit marcher, c’est à dire par la route de la pauvreté, de l’obéissance, du service et de « l’immolation de soi jusqu’à la mort, dont il est sorti victorieux, par la résurrection ».
Ad Gentes 2 et 5
Matthieu 2, 1-12
HOMELIE
Tout ce temps de Noël a été imprégné par la lumière qui resplendit dans les ténèbres, et malgré les ténèbres des hommes sont attirés par celui qui est la source de la lumière et sépare les ténèbres de la lumière,
Celui que les écritures annonçaient et nommaient « l’astre « n’était autre que Celui dont nous venons de célébrer la naissance, celui qui est la lumière, la source de toute lumière.
Matthieu nous dit comment cette lumière, le Christ, resplendit dans le monde, sur les hommes non pas de manière fulgurante mais lumière dans le cœur des hommes.
Mais aussi quand nous lisons l’évangile de Matthieu, force est de constater que le mystère de la Nativité, la naissance d’un enfant, Jésus, est un événement qui attire mais aussi perturbe le monde ! Quelle nouveauté apporte cet enfant dans l’histoire du monde ? c’est que l’on signale que des païens, des « mages venus d’Orient » ont vu son étoile et que des Juifs de Jérusalem vérifient l’événement en se référant aux Saintes Écritures.
Les hommes ne sont-ils pas tous en recherche de lumière, mais avec des réactions différentes.
Le langage universel du cosmos, l’astre, l’étoile qui a été perçue et la source particulière de la Bible se confirment l’un l’autre.
C’est ici et maintenant que le nouveau « roi des Juifs » doit être né.
Les réactions à cet événement sont très différentes. C’est la grande joie des Mages quand ils voient l’étoile s’arrêter au-dessus du lieu où l’enfant se trouvait ! Les plus anciens pèlerins de la tradition biblique ayant atteint le but de leur route, reconnaissent dans l’enfant Celui qu’ils ont cherché ils reconnaissent Dieu, se prosternent et retournent « par un autre chemin ».
D’autre part, Matthieu note les réactions différentes, voire opposées à la même nouvelle ! L’envie, la ruse et le mensonge montent au cœur de ce demi-juif qu’est Hérode, le « roi » de la Judée ! Il nourrit une violence qui le décide à l’extermination des enfants de Bethléem.
A côté de la réaction violente d’Hérode on note l’indifférence de ceux qui savent, connaissent par les Écritures.
Matthieu nous montre ainsi déjà quelle sera l’avenir et la fin tragique du Fils de l’homme et de la Bonne Nouvelle. Cette Bonne Nouvelle qui était destinée avant tout au peuple juif et à ses grands prêtres, à la suite de son indifférence et de son refus, quittera ce qui constitue la raison d’être du peuple juif, pour trouver son chemin auprès de païens. Matthieu fait donc bien autre chose que de raconter une belle histoire source de beaucoup de folklore.
« Nous avons vu son astre se lever » disent les mages : c’est cet astre qui les a mis en route, à la recherche de la lumière, que l’on trouve en tout homme.
Cette parole rejoint, au début de la Bible, la toute première parole de Dieu aux premiers versets de la Genèse : « que la lumière soit ». Dès le début Dieu dit ce qu’il veut être pour l’homme : le vainqueur du chaos et des ténèbres pour que la vie devienne possible.
Ceux dont l’évangile nous raconte le pèlerinage aujourd’hui, viennent de l’étranger, des régions du péché dont Dieu autrefois avait appelé Abraham. Dieu a fait venir les Mages du monde païen sans qu’ils ne l’aient en rien mérité. Pour adorer Dieu, ils sont venus de loin. Pour adorer Dieu, il nous faut aussi et toujours de quelque manière venir de loin, quelque part rompre avec nos habitudes, nous désinstaller et vivre en voyageurs, en route sur nos chemins d’Église.
Les autorités religieuses et les savants ont dit que le Sauveur devait naître à Bethléem. Les professionnels de l’enseignement religieux ont montré la route et ils l’ont fait sans se tromper. Ils ont bien interprété la pensée de Dieu et mis les autres sur le bon chemin, mais ils ne s’y sont pas eux-mêmes engagés.
Ils ont dit où il fallait se rendre, mais eux- mêmes n’y sont pas allés, ils n’ont même pas accompagné les mages.
A travers les siècles, on a donné à ces mages des noms, des couleurs, des âges, une race et un nombre. C’est Origène qui dit qu’ils sont trois simplement parce qu’il y a trois présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe. Ils ont donné tout ce qu’ils avaient dans un geste de prosternation, d’adoration : tout l’or de leur amour, tout l’encens de leur désir et toute la myrrhe de leur souffrance.
Au 12e siècle, les Milanais ont dit avoir retrouvé la tombe de ces Mages où leurs corps étaient conservé s intacts ! Le plus jeune avait 15 ans, le deuxième était estimé avoir 30 ans et le plus âgé 60 ! Et au même 12e siècle, on aurait transféré leurs reliques de Milan à Cologne où elles seraient conservées aujourd’hui encore !
Comme nous sommes loin de la Bonne Nouvelle perturbante ! Il nous faut sans cesse nous laisser guider jusqu’à Bethléem sachant que de toute manière il nous faudra en revenir par un autre chemin.
Là où les hommes s’efforcent de vivre ensemble devant la face du Seigneur, ils lui donnent la place qui lui revient. Une ville qui nous dit comment devrait être le monde ! Là est la « justice » au sens biblique du mot. Et « tous les gens » y viendront…quand des hommes vivront dans la lumière de Dieu.
L’Épiphanie est ainsi la fête, la célébration du voyage de l’homme de tout homme en quête de Dieu ou même il faudrait dire la fête de Dieu qui cherche l’homme et l’appelle par des signes, une étoile, sur le chemin ici-bas de la vie de tous les jours : l’étoile c’est un témoin, une parole d’amour, un service reçu, un regard, un témoin de Jésus…autant d’étoiles sur la route des hommes en quête de sens, de quelqu’un.
Que retenir pour nous ?
Nous sommes en route et guidés par l’étoile. Alors regardons l’étoile qui brille dans notre cœur, les étoiles qui brillent autour de nous : les signes par lesquels Dieu nous appelle, nous fait signe : ce sera un pauvre, une invitation à la prière, à lire la bible, à rendre service…cette étoile nous conduira à Jésus.
Tous les hommes sont appelés à découvrir le Christ, l’amour de Dieu, vivre la rencontre, comme les mages et berger = vie transformée = autre chemin
Et nous, nous sommes appelés à les rejoindre, « ceux qui sont à la périphérie ».
A être des étoiles pour les hommes d’aujourd’hui, une lumière d’amour dans les obscurités, les ténèbres parfois épaisses de notre monde.
Nous sachant nous-mêmes appelés …appelés à être de petites étoiles pour les hommes en recherches d’écoute, de paix, d’amitié.