1 ère lecture : Siracide 27/4-7

4 Quand on secoue le crible, les déchets demeurent, de même les tares
d’un homme quand il discute.
5 Comme le four éprouve les vases du potier, ainsi l’épreuve de l’homme
est dans son raisonnement.
6 Le fruit de l’arbre révèle comment on l’a cultivé, de même la discussion
les pensées du cœur de l’homme.
7 Ne loue personne avant de l’avoir entendu parler, c’est là en effet que
s’éprouvent les hommes.

A propos de cette lecture :

La bouche parle de l’abondance du cœur.
 
L’Eglise nous met aujourd’hui à l’école d’un sage : Jésus, fils de Sirac. D’où le nom de son œuvre : « Livre de Ben (= fils) Sirac le Sage », appelé aussi Siracide. Jésus ben Sirac tenait une école de philosophie à Jérusalem au début du 2e siècle avant Jésus-Christ. L’auteur s’appelait Jésus et selon la coutume on disait de qui il était le fils : en hébreu fils se traduit par ben, donc ici Jésus ben Sirac cad Jésus fils de Sirac.
C’est plus tard que les milieux chrétiens ont pris comme titre
« Ecclésiastique » sans doute pour signifier que cet ouvrage très vite a été lu dans l’assemblée liturgique chrétienne et dans les vieilles synagogues du Caire.
Quand cet ouvrage fut-il écrit ? Il fut tout d’abord écrit en hébreu vers l’an
190-180 et la traduction grecque, faite en Egypte, fut commencée en 132
avant Jésus-Christ . On suppose que cet ouvrage fut écrit vers 190. Ce n’est qu’en 1896 que fut découvert une bonne partie du texte original en hébreu puis une partie encore vers les années 60 et à Massada en 64.
Le Père Sandevoir écrit dans « la Bible et son message » « alors que les
manuscrits du Caire datent du Moyen-Age, entre le 9 e et 12 e siècle, ceux que Qumram et Massada datent au plus tard du 1er siècle de notre ère.
La Palestine est sous la domination des Séleucides dès 198 avant notre ère et l’influence se fait sentir sur les mentalités et les comportements. La tentation est d’imiter la mode du temps qui est alors celle du commerce, des affaires au détriment de la sagesse traditionnelle. Nous nous trouvons au sein d’un conflit entre deux sagesses : la course à la fortune, aux premières places et la sagesse de la folie de Dieu.
Le sage est soucieux de mettre son disciple qu’il considère comme son fils, à l’école du réel. Il n’avance pas des idées, des définitions théoriques de l’humilité ou de l’orgueil. Le savoir du sage, c’est un savoir-vivre qui prend des formes multiples :
savoir regarder, savoir parler, savoir faire. Le fondateur de la JOC , Cardijn proposait aux jeunes le voir, juger, agir, qui introduisent dans la sagesse évangélique.
 
Docilité au réel tel est le chemin du Sage : «  Pour lui tout est parabole, tout a un sens, tut nous parle, tout nous interroge. Les sage est toujours à l’école ; il se laisse toujours instruire. N’est-ce pas là une forme d’humilité ? » Lacan dans Assemb. du Seigneur 53.70
Il est intéressant de commencer notre lecture au verset 1 qui parle de l’amour du profit qui se glisse entre la vente et l’achat tel un piquet planté entre les pierres. L’amour du profit ferme les yeux sur son frère tant le désir de s’enrichir est grand. Il révèle le cœur profond de l’homme. L’auteur dénonce les maux de son temps qui sont ceux de tous
les temps. Il avertit , met en garde des dangers du commerce.
Lorsque nous entendons des proverbes ou des dictons, vite nous disons :
« c’est bien vrai ». Ils traduisent souvent ce que nous pressentons sans l’avoir pour autant explicité clairement. Ce sont des vérités «évidentes » qu’il est bon de réentendre.
Ben Sirac le Sage veut nous apprendre une sagesse de vie. Rien de bien
compliqué donc, rien de très philosophique mais une pratique pour la vie de tous les jours. La sagesse biblique permet de prendre au quotidien les bonnes décisions au bon moment.
Aujourd’hui, Ben Sirac le Sage nous dit que l’homme se révèle par sa parole.
On ne peut connaître quelqu’un uniquement de l’extérieur. C’est pourquoi
l’auteur nous enseigne cette sagesse essentielle : pour connaître quelqu’un, il nous faut l’écouter ! Ce n’est que dans une écoute patiente de l’autre que l’on peut déceler ce qui l’anime.
« Les quatre versets doivent s’interpréter dans le contexte de l’activité
commerciale évoquée dans le passage précédent ; comment apprécier
correctement la moralité d’un commerçant, sur son air honnête ou sur
l’abondance de ses paroles persuasives ? La réponse ne fait pas de doute :
en passant au crible ses paroles qui finissent par révéler ce qu’il est en vérité.
(…) Pour mieux comprendre sa pensée, Ben Sirac recourt à trois
comparaisons pittoresques qu’il vaut la peine d’examiner de près : l’image du tamis que l’on secoue, l’image du four qui éprouve les vases du potier, l’image de l’arbre dont les fruits permettent d’en vérifier la qualité.
V4 : Le crible . Il s’agit de l’instrument qui sépare le blé de la paille et des
autres impuretés. (…). Si l’homme veut bien s’examiner sereinement, ses
paroles ne sont pas toutes pures : il y en a qui n’ont pas de valeur qui devront être éliminées au tri final tels les mensonges lui apparaissent comme la bale qui reste dans le crible.
V5 : Le four du potier :C’est à ce moment que la qualité de la fabrication est mise à l’épreuve. L’homme est tenté si on le soumet quelque temps au feu croisé d’une série de demandes ; ses réponses ne tardent pas à révéler ce qu’il vaut, ses intentions bonnes ou mauvaises.
V6 : L’arbre et ses fruits : Les fruits permettent de juger la qualité de l’arbre.
« Il s’agit de faire comprendre combien la parole met au clair la nature intime de l’homme », « la parole d’un homme fait connaître ses sentiments ». « Le texte hébreu est un peu différent : ‘comme le travail de l’arbre ainsi sera le fruit : de même le discours comme le caractère de chacun’. (…) Il s’agit de faire comprendre combien la parole met au clair la nature intime de l’homme.
 
Celui-ci, s’il parle et répond aux questions posées, ne peut longtemps cacher le secret de sa pensée et de sa vie.
Le dernier verset propose, de manière générale le moyen le plus sûr pour
savoir si un homme peut ou non être loué, s’il vaut ou non quelque chose : il suffit de le faire longuement parler (v.7).
Ben Sirac pense qu’on a toujours à portée de la main un moyen décisif de faire une opinion sûre. L’homme en effet, ne peut indéfiniment voiler sa pensée. Il n’a pas en lui-même assez de force pour résister à la puissance de la Parole qui l’oblige à se démasquer ».