Malachie 3, 14-15  19-20a

13 Vous avez contre moi des paroles dures, – dit le Seigneur. Et vous osez demander : ‘Qu’avons-nous dit entre nous contre toi ?’
14 Voici ce que vous avez dit : ‘Servir Dieu n’a pas de sens. À quoi bon garder ses observances, mener une vie sans joie en présence du Seigneur de l’univers ?
15 Nous en venons à dire bienheureux les arrogants ; même ceux qui font le mal sont prospères, même s’ils mettent Dieu à l’épreuve, ils en réchappent !’
19 Voici que vient le jour du Seigneur, brûlant comme la fournaise. Tous les arrogants, tous ceux qui commettent l’impiété, seront de la paille. Le jour qui vient les consumera, – dit le Seigneur de l’univers –, il ne leur laissera ni racine ni branche.
20 Mais pour vous qui craignez mon nom, le Soleil de justice se lèvera : il apportera la guérison dans son rayonnement.

A propos de cette lecture

Malachie, n’est pas un nom de personne mais un pseudonyme signifiant : « mon messager ». Ce messager reste anonyme. Il écrit aux environs de 430 avant Jésus-Christ. Il est envoyé préparer le chemin devant le Seigneur. Son insistance sur le culte pourrait laisser entendre qu’il est lévite.

La première restauration du temple, au retour de l’Exil, n’a pas suffi : la ferveur et le culte n’ont pas été de pair. Malachie dénonce le manque de ferveur c.à.d. l’apathie des pratiquants et la négligence des prêtres ; Dieu va-t-il réveiller cette apathie ?

Le prophète annonce « le jour du Seigneur ». Pour l’ancien d’Israël, le jour du Seigneur arrive brutalement et est le triomphe de Dieu sur ses ennemis, sur le mal et ses auteurs.

Déjà Amos avait annoncé le jour du Seigneur en ces termes : « que sera-t-il pour vous le Jour du Seigneur ? Il sera ténèbres et non lumière. » 5, 18-20

Le jour du Seigneur ne serait-il que jugement ? Condamnation ? Dans l’espérance d’Israël, Dieu intervient au moment choisi par lui pour délivrer l’humanité du mal. La position de Malachie est délicate : il est face à une communauté désemparée, inquiète pour son avenir, déçue des conditions de vie trouvées au retour ! Que lui dire ? Quelle Bonne Nouvelle annoncer à des gens qui doutent et disent : « c’est une chose vaine de servir Dieu, qu’avons-nous gagné à observer ses commandements ? » v. 14 « C’est parce que le peuple est rivé au présent que Malachie est tendu vers l’avenir. » La mission est difficile et en proposant une tout autre lecture des événements,  il va « faire saisir à travers la critique d’un culte stérile, les enjeux de l’Histoire. Sur le mode apocalyptique, il dévoile une autre vision de ce qui est en train d’advenir, invitant les croyants à se démarquer par rapport à leur façon de voir et à se resituer dans la perspective de l’Avènement du Jour du Seigneur qui se prépare à manifester sa justice » A. Ruelle.

L’interpellation du prophète ne vise pas tant à ramener le peuple au temple qu’à raviver son Espérance envers son Dieu.

C’est dans une atmosphère de crise, assez semblable à la situation de l’Eglise aujourd’hui, que le prophète Malachie (« le Messager ») lance un cri : « Le Jour vient ». Cri destiné à répondre aux interrogations angoissées de ses frères dans la foi.

Ce sera un jour brûlant, bien autre que ce que les révolutionnaires attendent et nomment « grand soir » lequel établira un régime social totalement nouveau dans lequel les exploités prendraient leur revanche.

v.19 : Le « Jour du Seigneur » est une expression traditionnelle par laquelle les derniers prophètes (Joël, Zacharie) ravivent l’espérance d’Israël toujours ébranlée par la présence du mal dans le monde et qui paraît démentir la bonté, la justice et la promesse de Dieu. Malachie annonce l’avènement de Dieu comme imminent. Il dénonce l’arrogance des impies. Ceux-ci semblent triompher impunément, mais leur inconsistance, leur manque de solidité finira par se manifester. Paille ou arbre, l’infidélité, l’incroyance,  le péché-les nôtres- seront brûlés, purifiés par le feu. Aux impies, Malachie oppose les fidèles « craignant Dieu ». Pour eux, la venue du Soleil de Dieu fera l’effet d’un baume réconfortant « apportant la guérison. La justice de Dieu qui se lèvera comme un soleil est inséparable du Salut. Purification des péchés et guérison des blessures, tout notre mal, tout ce qui fait notre malheur doit disparaître par la brûlure bienfaisante de l’amour de Dieu » Célébrer 223. p.37-38.

Jour du Seigneur, jour où Dieu mettra un terme à l’histoire du monde et traitera chacun selon ses actes : « les arrogants et ceux qui commettent l’impiété seront de la paille » c.à.d. que ce jour de jugement sera pour eux une fournaise qui les consumera. Mais ce jour sera par excellence le jour de la tendresse du Seigneur pour ceux qui le craignent. Pour eux ce jour sera celui de la révélation de la douceur de Dieu.

« Voici que vient le jour du Seigneur brûlant comme la fournaise » : est une formule eschatologique. « La venue eschatologique de Dieu, le jour du Yahvé provoque dans les structures du cosmos un bouleversement total et introduit une rupture radicale dans le déroulement de l’histoire à laquelle il met un terme… Ce que les fidèles attendent dans l’histoire, Malachie le repousse à la fin des temps, mais celle-ci est imminente : « voici que vient le Jour ». Bernard Renaud dans Ass. du Sgr. 64.

19b : « le jour qui vient les consumera » : tel sera le sort des méchants, des arrogants ils seront déracinés. Tandis qu’un petit reste qui craint le nom du Seigneur, c.à.d. ceux qui reconnaissent qu’il vient, seront guéris par le Soleil qui se lève.

Malachie parle bien de jugement et de consumer. Marie-Noëlle Thabut propose une explication de l’image du feu, du soleil : «  on sait bien que le soleil est tantôt brûlant, dangereux, tantôt au contraire bienfaisant. Il apporte selon les cas, brûlure ou guérison…son action est double.  Pour le Soleil de Dieu, dont parle Malachie, c’est la même chose : rien n’échappe à sa lumière …C’est notre vie tout entière, notre être tout entier, qui sera exposé au soleil purificateur : il brûlera les uns, guérira les autres. » « Tous les arrogants, ceux qui commettent l’impiété, seront de la paille, le jour qui vient les consumera…mais pour vous  qui craignez mon nom, le Soleil de justice se lèvera : il apportera la guérison dans son rayonnement. »

Ce jugement de Dieu, en fait c’est une opération de purification, et alors, enfin, en chacun de nous Dieu reconnaîtra « son image et sa ressemblance » Il s’agit de passer de la nuit à la lumière  et laisser le Seigneur brûler en nous tout ce qui n’est pas appelé à demeurer en lui. Ce Jour du Seigneur est bien celui de la manifestation de la Tendresse de Dieu qui nous ramène sans cesse à lui, et non pas un jour de terreur.

Le prophète Malachie dit à ceux qui sont revenus d’exil et dont l’enthousiasme s’est effrité et qui ont perdu courage que si le mal est vissé aux creux du cœur humain , Dieu réussit toujours à faire jaillir la vie de ce qui semble mort.

Malachie nous dit à nous chrétiens tentés de découragement et de doute devant un christianisme qui semble en perte de vitesse  devant l’inefficacité apparente de la nouvelle évangélisation, Malachie nous dit qu’aujourd’hui même Dieu recrée le monde dans la justice, c’est-à-dire dans la paix et l’amour. Nous sommes invités à entrer dans ce mouvement de recréation du monde en mettant l’amour au cœur de nos vies et en étant des ouvriers de paix.