Siracide 35, 12-18
Note. La référence donnée ci-dessus, des versets 12-14,16-18, correspond aux versets du lectionnaire du missel. Ces mêmes versets se retrouvent avec les mêmes référence que celles de la TOB, aux vv. 15b-17 ; 20-22a.
12 Donne au Très-Haut selon ce qu’il te donne, et, sans être regardant, selon tes ressources.
13 Car le Seigneur est celui qui paye de retour, il te rendra sept fois plus que tu n’as donné.
14 N’essaye pas de l’influencer par des présents, il ne les acceptera pas ;
15 ne mets pas ta confiance dans un sacrifice injuste. Car le Seigneur est un juge qui se montre impartial envers les personnes.
16 Il ne défavorise pas le pauvre, il écoute la prière de l’opprimé.
17 Il ne méprise pas la supplication de l’orphelin, ni la plainte répétée de la veuve.
18 Les larmes de la veuve ne coulent-elles pas sur ses joues,
19 et son cri n’accuse-t-il pas celui qui la fait pleurer ?
Pour comprendre le livre du Siracide, il faut se rappeler l’époque à laquelle il a été écrit et les conditions de vie que connaissaient les croyants. C’est avant l’insurrection des Maccabées, vers 167 av. J.C. : la culture hellénistique s’était répandue dans tout le Proche Orient et avait atteint Jérusalem. Cette nouvelle culture, apportée par les grecs depuis la conquête d’Alexandre le Grand, et devenue internationale, risquait d’ébranler les fondements de la foi du judaïsme.
Les gens aisés adoptaient les coutumes de la nouvelle culture dominante. « Les riches lisent les philosophes grecs et font éduquer leurs enfants au gymnase ; ils ne s’intéressent guère au particularisme juif et à ses usages. Le petit peuple lui reste fidèle au Temple et perpétue la tradition » Vermeylen dans Feu Nouveau 56.6
Ce livre œuvre d’un certain Josué, fils de Sirac, d’où son nom Ben Sirac. De son nom vient l’appellation du livre « Siracide » appelé autrefois Ecclésiastique. Ben Sirac a une école de sagesse à Jérusalem pour éduquer les jeunes de la bourgeoisie.
L’auteur a pour but de défendre les valeurs ainsi que l’héritage culturel et religieux que son peuple s’est façonné au cours des générations et pour lequel il s’est battu , tout au long des siècles et des générations qui les ont précédées. Il s’agit d’aider ses contemporains à garder leur identité juive dans un monde en plein bouleversement : en fait Israël n’a rien à envier à la culture grecque ni à sa philosophie ni à sa religion.
Ce qui marque l’identité juive est bien leur foi dans le tout puissant qui s’est révélé à Abraham, Moïse et à leurs pères. C’est leur foi et la fréquentation de la Torah qui les a toujours soutenus lorsqu’ils étaient en milieu étranger .
« L’auteur insiste sur la priorité du sacrifice intérieur : la recherche de la volonté de Dieu, la justice, la miséricorde. Puis il décrit la vraie prière, quels que soient les rites : on n’achète pas Dieu par des sacrifices coûteux. Il écoute les appels de ceux qui souffrent : « le pauvre, l’opprimé, l’orphelin, la veuve. » Cahier Evangile 100 p 62.
Confrontée à la sagesse grecque, la grande Sagesse qui leur est venue de Dieu apparaît bien comme un don gratuit de Dieu qui depuis les origines inspire toute leur vie : leurs mœurs ne sont-elles pas inspirées de Dieu lui-même ?
Dieu ne fait pas de différence entre les hommes, rappelle le Sage. Il n’est pas indifférent mais attentif à chacun en ce qu’il a de propre, de personnel. Dieu ne se laisse pas arrêter par l’apparence ni guider par l’intérêt. En s’inspirant de la générosité divine, le croyant est dès lors invité au partage. Cependant l’auteur insiste sur la prédilection de Dieu pour le pauvre. Sa prière traverse les nuées, non pas les nuages, mais l’obscurité de la nuit de la foi. Sa prière est un cri qui va jusqu’au cœur de Dieu qui ne reste pas insensible : « il ne tardera pas », « les larmes de la veuve ne coulent-elles pas sur ses joues ? ». Dieu prend au sérieux la prière du pauvre, de l’orphelin, de l’opprimé, il est leur avocat, « jusqu’à ce qu’il ait brisé les reins de l’homme sans pitié ». v. 22.
Le pauvre, c’est le démuni qui n’a plus rien à attendre des humains et s’en remet à la justice de Dieu qui peut briser la résistance des hommes sans pitié. Il est présenté comme le type du priant qui se confie et s’en remet totalement à la miséricorde du Seigneur : « il élève les humbles, il comble de bien les affamés.
« Si telle était sans doute la portée des déclarations du Siracide en ce temps là, le texte a d’autres résonances aujourd’hui. Il souligne l’impartialité de Dieu, et cette affirmation sera reprise par Pierre dans son discours chez Corneille : « Dieu n’est pas partial : en toute nation quiconque le craint et pratique la justice trouve accueil auprès de lui » ‘Ac 10,34). Il n’est lié à aucun pays, à aucune classe sociale, à aucune culture. Peut-être pourrait-on ajouter : à aucune religion particulière, mais plutôt à la pratique de la justice. D’autre part, ce texte invite à la persévérance dans la prière, dans la perspective des lectures de dimanche dernier » Vermeylen dans Feu Nouveau 56.6.