Le temps de l’Avent : c’est le début d’une nouvelle année liturgique, non pas un recommencement mais une année de renouveau de notre foi, de notre relation au Seigneur qui va illuminer toute notre vie. Voilà le don que le Seigneur désire nous faire : nous voir grandir dans la foi, dans l’amour, à travers les événements de nos vies et ainsi nous associer à la croissance du Royaume.
A propos des lectures
Esaïe 63,16b – 17.19b ; 64,2b-7
Isaïe est convaincu que Dieu est passionné d’amour pour son peuple, aussi l’invite-t-il à regarder sa misère pour lui venir en aide. Après avoir invité (v15) Dieu à regarder sa misère du haut des cieux, Israël reconnaît que Dieu est avant tout Père et Sauveur : « notre Père c’est toi » et puisqu’il est Père on peut se plaindre à lui : « pourquoi Yahvé nous égares-tu loin de tes voies ? ».
« Paradoxalement on lui demande à lui, Dieu, de se convertir, de changer d’attitude à l’égard de son peuple dont il semble s’être retiré », la situation semble pour autant désespérante.
Quelle façon étonnante d’être notre Père ! Pourquoi nous laisses-tu loin de tes voies ? Pourquoi rends-tu nos cœurs insensibles à tes voies ? Comme si on rendait Dieu responsable de nos égarements, de notre tiédeur ! L’auteur espère et appelle une manifestation, une intervention spéciale du Seigneur pour sauver son peuple : il voudrait que les cieux s’ouvrent et Dieu se manifeste.
« Ah ! Seigneur Dieu, si tu déchirais les cieux qui nous séparent de Toi et si tu descendais ! »
Le cri du vieux prophète, c’est aussi le nôtre aujourd’hui, celui des hommes et des femmes d’aujourd’hui. Pour nous visiter et descendre jusqu’à nous, Dieu doit déchirer les cieux. Il doit franchir la grande distance qui nous sépare de lui.
Cela est fait depuis qu’au baptême de Jésus par Jean-Baptiste, les cieux se sont ouverts et l’Esprit s’est manifesté et la voix du Père s’est fait entendre : « celui-ci est mon Fils bien-aimé ».
Depuis nous avons la chance d’avoir la parole du Christ, son Esprit, l’Eucharistie.
Autant de signes de sa présence, non pas des signes muets mais qui nous parlent encore.
I Cor. 1, 3-9
3. à vous grâce et paix de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus Christ.
4. Je rends grâce à Dieu sans cesse à votre sujet, pour la grâce de Dieu qui vous a été donnée dans le Christ Jésus.
5. Car vous avez été, en lui, comblés de toutes les richesses, toutes celles de la parole et toutes celles de la connaissance.
6. C’est que le témoignage rendu au Christ s’est affermi en vous,
7. si bien qu’il ne vous manque aucun don de la grâce, à vous qui attendez la révélation de notre Seigneur Jésus Christ.
8. C’est lui aussi qui vous affermira jusqu’à la fin, pour que vous soyez irréprochables au Jour de notre Seigneur Jésus Christ.
9. Il est fidèle, le Dieu qui vous a appelés à la communion avec son Fils Jésus Christ, notre Seigneur.
Une première constatation : Paul nous introduit de façon remarquable dans ce temps en disant : « Je rends grâce à Dieu sans cesse à votre sujet, pour la grâce de Dieu qui vous a été donnée dans le Christ Jésus. « Car vous avez été, en lui, comblés de toutes les richesses, toutes celles de la parole et toutes celles de la connaissance.
v.3, dès les premiers versets de cette péricope, le mot « grâce » revient plusieurs fois puis est remplacé par « toutes les richesses » et encore au v. 7 par « le don de la grâce ».
Pour Paul, la grâce est bel et bien le point de départ de tout, c’est la fidélité de Dieu qui appelle, donne et se donne à ceux qu’il appelle. C’est l’amour de Dieu qui appelle, donne et se donne à tout croyant pour faire route avec lui, « grâce de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus. » La « grâce » est conjuguée de multiples façons : elle est à l’origine de la foi et de l’agir du croyant, sans pour autant, le démobiliser, ni le démotiver dans son agir de chrétien. L’action de grâce est donc l’attitude fondamentale du chrétien et de toute communauté chrétienne qui reconnaît qu’elle se reçoit entièrement de Dieu. Dès l’introduction de sa lettre aux chrétiens de Corinthe, l’apôtre, en s’adressant à l’Église, va à l’essentiel de l’Évangile du salut tel qu’il le proclame : « à ceux qui ont été sanctifiés dans le Christ Jésus, appelés à être saints avec tous ceux qui invoquent en tout lieu le nom de notre Seigneur Jésus Christ, à vous, grâce et paix de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus Christ. » v. 2.3
Au lieu de dénoncer brutalement les divisions qui déchirent la communauté, il rend grâce et lui rappelle son identité : ses membres sont en fait et tous ensemble l’Église de Dieu, tous appelés à la sainteté parce que déjà sanctifiés dans le Christ. Il rappelle qu’ils appartiennent à une communauté que Dieu seul a convoquée et que lui seul régit : une communauté bien plus vaste que leur petit groupe, que Dieu seul rassemble parce que seul il en a l’initiative, en vue de la révélation de notre Seigneur Jésus-Christ qui nous fera tenir jusqu’au bout. C’est une action de grâce, et non une sorte d’autosatisfaction repliée sur elle-même, elle ouvre à l’Église universelle.
L’Église de Corinthe n’existe pas pour elle-même mais comme partie de l’Église universelle, elle se doit donc de dépasser ses divisions et de manifester par sa cohésion interne que le salut se réalise de manière décisive dans tout le peuple que Dieu s’est acquis. Elle est une Église toujours en marche « jusqu’à la fin » et assurée du soutien de Dieu qui l’affermit. Nous sommes une portion du peuple de Dieu et notre témoignage, là où nous habitons, est signe du salut réalisé ; il est bien certain que notre début de communion n’est qu’une ébauche du salut, un commencement, et qu’elle n’est pas tant le fruit de nos efforts que le salut de Dieu à l’œuvre. Tel est le thème de la péricope de ce premier dimanche de l’avent.
Comment situer cette grâce de l’appel et le temps de l’Avent ?
Dans ces versets, Paul creuse avec insistance la réalité de l’Église de Dieu : cette communauté est la communauté des « sanctifiés dans le Christ Jésus », car la grâce de Dieu leur a été donnée en plénitude. Ils sont déjà saints dans le sens biblique, et par le baptême ils sont entrés en communication avec la sainteté divine. C’est par Jésus, en Jésus que Dieu fait communication intime de son être de Dieu. « En lui, comblés de toutes les richesses, » : la communication se fait par le Christ en qui Dieu s’est réconcilié le monde et l’a justifié. Elle se fait par le Christ et se fonde sur l’événement décisif de sa mort-résurrection : tout baptisé y entre par la foi, afin de mourir au péché pour vivre dans le Christ Jésus pour Dieu et rendre témoignage à Celui qui comble.
Cette sainteté ne porte pas sur l’homme mais sur l’action de Dieu dans l’homme. L’action de Dieu ne s’arrête pas seulement à l’appel, car Dieu lorsqu’il s’adjoint des personnes, les fait entrer dans sa proximité et aussitôt les sanctifie, les transforme radicalement. C’est cette transformation que nous retrouvons chez les nouveaux convertis qui laissent l’Esprit œuvrer en eux, comme brûlés par le feu de son amour.
Paul ne se contente pas de dire que la sainteté est un état dans lequel les baptisés sont plongés, il veut leur faire comprendre la puissance, le dynamisme qui les habite et qu’ils ont à mettre en œuvre dans leur vie : ils sont dans le « devenir » et non pas installés une fois pour toutes : au v. 8 « C’est lui aussi qui vous affermira jusqu’à la fin, pour que vous soyez irréprochables au jour de notre Seigneur Jésus Christ.
En disant qu’ils sont saints il n’entrevoit pas leur condition future mais il entend signifier pour le présent le sens même de leur vocation dans le monde : au nom de Dieu et dans le Christ ils ont été choisis, mis à part pour ce témoignage permanent.
Voilà notre chance dit Paul : nous sommes comblés de toutes les richesses de Dieu et Paul nous invite à rendre grâce pour le don gratuit de Dieu et l’abondance de grâce : « il ne vous manque aucun don de la grâce ».
Évangile : Marc 13, 33-37
32. Quant à ce jour et à cette heure-là, nul ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais seulement le Père.
33. Prenez garde, restez éveillés : car vous ne savez pas quand le temps viendra.
34. C’est comme un homme parti en voyage : en quittant sa maison, il a donné tout pouvoir à ses serviteurs, fixé à chacun son travail, et demandé au portier de veiller.
35. Veillez donc, car vous ne savez pas quand le maître de la maison viendra, le soir ou à minuit, au chant du coq ou le matin.
36. Il ne faudrait pas qu’arrivant à l’improviste, il vous trouve endormis.
37. Ce que je vous dis là, je le dis à tous : Veillez ! »
Le Seigneur est déjà venu, il y a plus de 20 siècles nous révéler quel Dieu d’Amour il est pour les hommes. En se faisant homme-Dieu, Dieu-homme, renouant le contact avec les hommes, il se fait proche de nous pour nous rendre proche de Lui et rendre notre humanité plus humaine et que l’homme puisse devenir ce qu’il est « fils de Dieu » :
Il est là et nous ne l’avons pas encore bien reconnu au milieu de nous il est encore étranger ! Jean nous le dit dans son évangile : « et les siens ne l’ont pas reçu ». Est-ce un échec ? Il savait qu’il y aurait ce refus et cela n’a pas empêché Jésus, Dieu qui a pris un corps d’homme, de bébé, de venir chez nous : désormais il a pris demeure chez nous. Voilà qui change tout.
Il faut reconnaître que notre environnement n’aide pas à le rendre présent et à nous préparer à l’accueillir. Tout au contraire tente d’occulter la présence du Christ parmi nous en attirant notre attention ailleurs …tant de choses qui cachent le vrai sens de Noël, et nous distraient de la présence de Jésus au milieu de nous, qui nous empêchent comme le recommandait l’évangile de dimanche dernier de le voir dans le frère, le voisin, le pauvre, celui qui souffre, c’est à nous d’ouvrir les yeux, d’être vigilants. Veillez-nous dit Jésus avec insistance.
On a l’impression de faire marche arrière : au début du christianisme, au temps de la Gaule, aux solstices d’hiver lorsque le soleil était au plus bas, on invoquait avec force le soleil pour le réveiller afin qu’il reprenne sa vigueur et toute sa clarté. L’Église en ce temps a fait de cette fête païenne la fête de la naissance du Christ qui est la lumière par excellence, celui qui illumine les nations et le monde les cœurs qui donne sens à la vie et nous relance vers la vie. La fête païenne est devenue chrétienne et voilà qu’aujourd’hui la fête chrétienne voudrait redevenir païenne en se perdant au milieu des paillettes et lumières artificielles.
La liturgie de ce dimanche nous met en garde, nous invite envers et contre tout à être vigilant : « veillez, vous ne savez ni le jour ni le moment où le Seigneur viendra ». Dans l’évangile Jésus parle quatre fois de « veiller »…Pourquoi ? en vue de quoi ? Le message est bref : le Seigneur est parti et va revenir…Oui nous en convenons il semble bien absent. Mais ce n’est pas fini, il revient. Si le Seigneur va revenir, c’est qu’il est déjà parti : en partant il nous a confié une mission : il nous a donné « tout pouvoir », il a fixé à chacun son travail, il nous recommande, comme au portier, de veiller. Il nous a donné tout pouvoir : – pas de faire n’importe quoi – le chrétien a une responsabilité, une mission. Trop souvent, face aux situations difficiles, nous nous demandons que faire et nous disons trop vite que nous ne pouvons rien faire, cela nous dépasse. Il a fixé à chacun son travail : et pour le faire, Paul nous disait que le Seigneur nous comblé de toutes ses grâces.