Ezéchiel 17
22 Ainsi parle le Seigneur Dieu : « À la cime du grand cèdre,
je prendrai une tige ; au sommet de sa ramure,
j’en cueillerai une toute jeune, et je la planterai moi-même
sur une montagne très élevée.
23 Sur la haute montagne d’Israël je la planterai. Elle portera des rameaux, et produira du fruit,
elle deviendra un cèdre magnifique. En dessous d’elle habiteront tous les passereaux
et toutes sortes d’oiseaux, à l’ombre de ses branches ils habiteront.
24 Alors tous les arbres des champs sauront que Je suis le Seigneur :
je renverse l’arbre élevé et relève l’arbre renversé,
je fais sécher l’arbre vert et reverdir l’arbre sec.
Je suis le Seigneur, j’ai parlé, et je le ferai. »
A propos de cette lecture.
Nous sommes en 597, année douloureuse pour le peuple d’Israël. Jérusalem est tombée aux mains de Nabuchodonosor et le roi a été emmené en exil à Babylone ainsi qu’une bonne partie du peuple. Ezéchiel fait partie des exilés.
Quand le prophète prononce ces paroles, il est déporté à Babylone, à près de mille kilomètres de chez lui. Son peuple a tout perdu. .La mission d’Ezéchiel est de maintenir l’espérance en éveil. Il porte bien son nom : Dieu est fort ou Dieu rend fort.
Le chapitre 17 est une allégorie dirigée contre la politique pro égyptienne de Sédécias, roi de Juda :c’est un message de sévérité qu’il adresse à l’élite et cependant il annonce , au terme de la déportation, la Réconciliation et l’Alliance renouvelée du Seigneur il contient deux paraboles semblables : v.3-8 et v. 22-24. En 24 versets Ezéchiel annonce une histoire d’Israël et une critique des rois ses contemporains sous la forme d’une allégorie.
Le peuple semble s’être résigné à ne plus rien espérer, à se laisser mourir. Dieu ne l’aurait-il pas oublié ? Ezéchiel à travers ces allégories remplit sa mission prophétique : il encourage le peuple, au bord du désespoir, en lui annonçant que le Seigneur ne l’abandonne pas .
Pour bien comprendre et déchiffrer ces allégories il faut en prendre la clé.. Que voit notre visionnaire Ezéchiel ? Il voit le grand aigle aux grandes ailes, il s’agit de Nabuchodonosor qui a déporté à Babylone le haut de la cime du cèdre, le roi Joachim et les notables de Jérusalem
« Sur la cime du cèdre, c.à.d. la dynastie de David, Dieu va cueillir un rameau tendre et le planter sur la haute montagne. On peut penser que la bouture prélevée par le Seigneur représente le futur roi de la dynastie, de la lignée de David. C’est à un peuple désespéré qu’Ezéchiel affirme, par une parabole, que rien n’est perdu ; là où la mort règne, Dieu a le pouvoir de créer de la vie. Dieu va ramener sur le sol d’Israël un descendant de David, v. 22-23. Ce rejeton deviendra un roi puissant, « il deviendra un cèdre splendide », à l’abri duquel les nations viendront s’abriter pour y trouver refuge.
L’image du cèdre utilisée pour symboliser un roi, se rencontre plusieurs fois dans la bible. La parabole annonce qu’en dépit des apparences, Dieu n’a pas abandonné son peuple et le Seigneur va ramener sur le sol d’Israël un descendant de David (v. 22-23a) qui deviendra grand et puissant (v 23). Cette allégorie ne concerne pas seulement le roi, mais aussi tout le peuple élu de Dieu :: cette action divine ne sera pas simple restauration du peuple dans le cadre d’une nouvelle alliance telle que l’annonce le prophète, « mais comme l’indique la conclusion du texte se référant à la parole créatrice du livre de la Genèse (Je l’ai dit et je le ferai), une recréation, une résurrection qui manifestera de façon indiscutable que Dieu est intervenu…
Ce texte peut faire écho à l’évangile. On lit en effet à la fin de la parabole du grain de sénevé, Mc. 4,32: « tous les oiseaux du ciel peuvent faire leur nid à son ombre. » Mais cette phrase ne peut s’expliquer que par un mélange d’Ezéchiel 17,23 et de Daniel 4,9 : « 9. Son feuillage était beau et ses fruits abondants: il y avait en lui de la nourriture pour tous. Sous lui s’abritaient les bêtes des champs, dans ses ramures demeuraient les oiseaux du ciel, et de lui se nourrissait toute chair ». Et le Psaume 104,12-13 : «12 Près d’elle (l’eau) s’abritent les oiseaux du ciel qui chantent dans le feuillage. 13 Depuis ses demeures, il abreuve les montagnes, la terre se rassasie du fruit de ton travail: chacun de ces versets apportant un ou deux mots à la formule de Marc » Bris
C’est Dieu qui est à l’œuvre dans cette restauration et non pas les efforts humains ni les tractations politiques. Dans son évangile de Marc, Monloubou écrit : « une méditation sur le rôle des hommes dans la construction du Royaume…un rôle nécessaire qui réclame beaucoup d’eux… qui réclame surtout la foi en Dieu qui, à sa manière, toujours surprenante, donne et construit le Royaume ». Une méditation sur le rôle des hommes mais surtout la révélation de Yahvé : « et tous les arbres sauront que je SUIS Yahvé ». C’est la mission du prophète de révéler le sens des événements aussi dramatiques soient-ils, et de dire quel Dieu se révèle à travers et au-delà de ceux-ci.
Comment se révèle-t-il ? Qui est-il ? « Moi, Yahvé je SUIS ».
« celui qui abaisse l’arbre élevé…, celui qui élève l’arbre bas…, celui qui dessèche l’arbre vert…, celui qui fait verdir l’arbre sec… ». Ne retrouve-t-on pas ici des accents du magnificat : « il élève les humbles…il renvoie les riches les mains vides…il comble de biens les affamés… ».
« Moi Yahvé j’ai parlé et je ferai » Quel chant d’espérance pour ceux qui ont au cœur le creux de la déchéance et de l’abandon ! Chant d’espérance qui n’a rien d’une utopie puisque Dieu ramènera son peuple et lui rendra sa terre, la fera reverdir, et va élever le peuple humilié durant tout ce long d’exil.
La parabole de la graine de moutarde fait écho à cette parabole du prophète Ezéchiel : le jeune rameau deviendra un jour un cèdre magnifique.
. La graine de moutarde, la plus petite des graines, image du Royaume, va devenir un arbre qui abrite toutes sortes d’oiseaux.
Vie qui sera d’abord fragile comme un jeune rameau, mais celui-ci deviendra un arbre immense où toutes les nations du monde pourront s’abriter, comme des oiseaux dans les branches du cèdre.
Terminons en citant J. Asurmendi dans Cahier Évangile n°38 page 66 : « Être prophète à la suite d’Ezéchiel, c’est être attentif à ce qui se passe en nous et autour de nous, c’est être capable de lire les événements pour les comprendre, avoir des yeux ouverts et l’oreille aux aguets pour voir et entendre , être prêt au changement , au retournement , à la conversion, ne pas s’en accommoder , de ne pas se couler dans un moule, ne pas s’installer dans la monotonie et dans la répétition , ne pas prendre le passé comme seule norme et seul horizon, avoir de l’espoir et être enraciné dans l’espérance, , ne pas avoir peur et croire dans la vie et dans les autres. C’est tout simplement suivre sur son chemin, Jésus Christ, le prophète »