Isaïe 55, 10-11

6 – Cherchez le Seigneur tant qu’il se laisse trouver ; invoquez-le tant qu’il est proche.

7 – Que le méchant abandonne son chemin, et l’homme perfide, ses pensées ! Qu’il revienne vers le Seigneur qui lui montrera sa miséricorde, vers notre Dieu qui est riche en pardon.

8 – Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos chemins ne sont pas mes chemins, – oracle du Seigneur.

9 – Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes chemins sont élevés au-dessus de vos chemins, et mes pensées, au-dessus de vos pensées.

10 – La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, donnant la semence au semeur et le pain à celui qui doit manger ;

11 – ainsi ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce qui me plaît, sans avoir accompli sa mission.

 

A propos de cette lecture :

Les chapitres 40 à 55 d’Isaïe s’appellent le Livre de la Consolation : Dieu annonce à son peuple, exilé à Babylone, sa libération toute proche. Le peuple est pris entre la foi dans la Parole du prophète et le doute de sa réalisation effective. La mission d’Isaïe est maintenant de fortifier la foi du peuple.

Pris dans le Deutero-Isaïe ce texte relate les événements de 536-538 av JC, vers la fin de l’exil à Babylone et peu avant la chute de Babylone au moment où l’étoile de Cyrus monte en flèche et menace les rois voisins.

Écrits vers 540 av JC ils forment un long poème dans lequel Dieu annonce qu’il va libérer son peuple et le ramener de son exil à Babylone. Cyrus fait rêver et le prophète voit la réalisation des promesses de Dieu se profiler à l’horizon. Il apprend à espérer en décryptant les signes et surtout il découvre la solidité des promesses de Dieu et à travers elles l’efficacité de sa Parole. Dieu annonce qu’il y aura un nouvel exode, que sa parole est efficace et que la puissance de Dieu réalise toujours ses desseins.

« Du début à la fin, le Deutero-Isaïe affirme sans cesse que la parole de Yahvé dirige l’histoire du monde…tout passe mais la parole de Dieu demeure toujours ». Maggioni dans Ass du Seigneur 46 pe5

Cette première lecture évoque la puissance, la fécondité de la Parole. L’évangile corrige les images pour préciser que c’est une Parole vivante, le Christ (évangile) et que les terrains sont des êtres vivants qui ont à accueillir la semence pour lui permettre de déployer toutes ses capacités et virtualités en vue du Royaume. « L’Esprit est l’agent de la germination ; enfin c’est toute la création qui est concernée par l’action du semeur et par la manière dont les terrains reçoivent la semence ».

A un moment où le peuple a tout motif de mettre en doute la Parole de Dieu, où son départ en exil pourrait être interprété comme la mise en question du dessein de Dieu, et un démenti aux promesses de Dieu, « l’exil pose donc un problème théologique, un problème de foi : Yahvé est-il encore le Dieu qui sauve, reste-t-il fidèle à ses promesses ? est-il encore le Dieu de l’histoire ? Israël doit retrouver sa foi en la parole de Dieu et ne pas mettre en doute son élection : il doit se savoir aimé de Dieu et en sécurité à l’ombre de sa fidélité. Yahvé a gardé le silence pour un temps mais maintenant il va donner de la voix » Maggioni dans Ass du Seigneur 46 pe7

Le prophète du second Isaïe invite les exilés à s’alimenter aux sources, à la Parole de Dieu pour fortifier et nourrir sa foi ébranlée.Pour goûter cette Parole et lui permettre d’être féconde, le terrain où elle va tomber doit être préparé, le cœur devenir accueillant. Cette Parole d’Alliance est Parole créatrice : «  elle dit ce que Dieu veut , elle fera ce que Dieu dit ». Dieu parle et ce qu’il dit existe : Ps 32/33,1.
Le lectionnaire pour faire court ne reprend que les versets 10 et 11 du chap 55. Je propose de prendre à partir des versets 6.
« Ces versets nous diront que l’efficacité de la Parole dont il est question dans vv10-11 est une efficacité en vue de la conversion ; que le méchant abandonne sa voie(v7). Ils nous diront aussi que , si nos versets ont recours à une comparaison tirée de la nature pour nous parler de Dieu, c’est parce que Dieu est mystère : «  mes voies ne sont pas vos voies »(v8) et que, puisqu’il est l’auteur de la nature et l’auteur de la parole nous pouvons trouver dans la première de quoi parler de façon imagées de la deuxième »

Pour bien comprendre ce passage  allons revoir les versets 6 à 9 qui disent que l’efficacité de la parole c’est en vue d’une conversion

6  Cherchez le Seigneur tant qu’il se laisse trouver ;invoquez-le tant qu’il est proche.
7 Que le méchant abandonne son chemin, et l’homme perfide, ses pensées !Qu’il revienne vers le Seigneur qui lui montrera sa miséricorde, vers notre Dieu qui est riche en pardon.
8  Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos chemins ne sont pas mes chemins,
oracle du Seigneur.

 

La création n’est pas faite une fois pour toutes, elle est toujours à l’œuvre. Jésus a été façonné par cette Parole : « elle dit ce que Dieu veut et elle fera ce que Dieu dit ».

« Ma nourriture c’est de faire la volonté de mon Père » cad être fidèle à son Esprit, à sa Parole. La Parole de Dieu  a accompagné, dirigé toute l’histoire du peuple de Dieu dans le Deutero Isaïe. Les hommes passent et la puissance de la Parole de Dieu se manifeste dans l’histoire des hommes. Ainsi Dieu parle à l’homme au moment de là vie où il se trouve, elle peut être vivante, source de vie .

Dans ce chapitre 55 les premiers versets (1-5) parlent d’une invitation au peuple, d’une joyeuse nouvelle «  qui prend appui sur l’alliance faite autrefois avec la maison de David, mais étendue maintenant à tout le peuple et qui se prolonge par l’assurance de l’exaltation d’Israël sur toutes les nations .

Les versets suivants sont une invitation à la conversion,  à aller à la recherche du Seigneur et à  découvrir qu’il est le Dieu  qui ne se lasse pas de pardonner. Un Dieu à l’antithèse de nos pensées  et des voies que nous prenons. Aussi le prophète insiste sur l’urgence de la conversion tant est important et urgent l’appel du Seigneur. Laissez-vous séduire  par l’amour de Dieu, par sa Parole et correspondez à ce qu’il attend de vous pour votre bonheur et pour cela entrez dans le mouvement de conversion qui progressivement vous rendra libres.

V6 : Quel est ce Dieu qui se laisse trouver ? Il est proche de tous ceux qui l’invoquent.

V7 : Le premier fruit de la proximité de Dieu c’est la conversion, le retour du pécheur vers Dieu par une sorte d’attirance libre : «  le méchant abandonne sa voie , l’homme inique ses pensées. Il s’agit d’ajuster les pensées du croyant à celles de Dieu et non pas le contraire.

En lien avec la parabole du semeur de l’Évangile, le lectionnaire n’a retenu que les deux derniers versets (10 et 11) de  cet oracle où le prophète a commencé par inviter les exilés à s’alimenter aux sources de la gratuité de la Parole pour y puiser une nourriture solide qui leur fera vivre une foi authentique. Il faut dès maintenant chercher le Seigneur dans la prière, la conversion, à l’écoute de sa Parole.

V10 : « La pluie, la neige » : le cycle de l’eau ne s’arrête pas à la production agricole qui permet de porter du fruit. « Par ce rapprochement avec l’élément eau, la parole de Dieu est assimilée à une puissance créatrice de vie, de dynamisme, d’énergie renouvelée » (Vie Lit. Québec).

Cette première lecture, évoque la puissance de la fécondité de la Parole, elle corrige ce que les images de la semence, de la pluie et de la neige pourraient avoir de trop matériel. C’est une parole créatrice, vivante, qui donne la vie: le Christ ; les terrains sont des êtres vivants qui accueillent la Parole ; la germination un enfantement, un engendrement avec tout ce que cela implique de patience ; l’Esprit est l’agent de la germination. C’est toute la création qui est concernée par l’action du semeur. La Parole créatrice accompagne l’homme tout au long de sa route : ma parole qui sort de ma bouche ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir accompli sa mission.

Israël va refaire l’expérience d’un Dieu qui est proche de tous ceux qui l’invoquent, qui  se laisse trouver par ceux qui le fréquentent. Le temps de la proximité de Dieu est aussi le temps de la repentance des humains. Ses chemins n’empruntent-ils pas les nôtres ? mais il faut le chercher sur la route de l’exil.

Isaïe va illustrer son propos à l’aide d’une image empruntée à la météorologie : le phénomène de la pluie et la neige qui arrosent et fécondent la terre, la nature et toutes les cultures. La Parole de Dieu est féconde pour l’homme : elle lui fournit tout pour qu’elle porte du fruit : la semence, la croissance et le pain.

L’efficacité, la fécondité de la Parole de Dieu, ici personnifiée, est aussi infaillible que celle de la pluie et  toujours disponible. Comme son Envoyé, elle accomplit jusqu’au bout ce qu’elle dit, elle fait toujours ce qui lui plaît, c’est-à-dire créer fidèlement une histoire d’alliance entre elle et le peuple.

Dieu envoie sa Parole et elle lui revient  une fois sa mission accomplie : la neige et la pluie suggèrent un travail lent et silencieux, elles disparaissent mais seul le fruit reste comme preuve de l’abondance et de la puissance fécondante de sa parole.

La Parole de Dieu exécute ses desseins comme à l’origine de la création. Son œuvre depuis l’origine n’a pas fini de transformer toute la terre et le cœur des hommes.

A un peuple qui se met à douter de la fidélité de Dieu à sa Parole, le prophète rappelle que, par-delà l’apparente déconvenue, Dieu a sa façon à lui de tenir parole. Il faut prendre le risque de continuer à lui faire confiance.

Il faut dès maintenant nous préparer à cette Rencontre avec le Seigneur, nous mettre à son écoute, laisser sa Parole pénétrer, nous apprivoiser pour entrer dans le mouvement de conversion dans lequel elle nous entraîne.

 

P.S. Pour la prière

Ps 147

15 Il envoie son verbe sur terre, rapide court sa parole;

16 il dispense la neige comme laine, répand le givre comme cendre.

17 Il jette sa glace par morceaux: à sa froidure, qui peut tenir?

18 Il envoie sa parole et fait fondre, il souffle son vent, les eaux coulent.